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un grand avenir s’il est reconnu par les autres puissances, et seulement aidé de leur médiation, car il faut bien qu’on sache que l’ouest n’a pas renoncé à son rêve de l’unité territoriale. Dès qu’un moment de calme se produit dans sa situation intérieure, l’ancienne province française dirige ses bandes sur la frontière, et les hostilités recommencent. Bien qu’il soit facile de savoir à quoi s’en tenir sur les bulletins du général Pierrot, et qu’on puisse se rassurer en voyant la distance qui sépare Lescaobas, lieu de sa dernière victoire, de Santo-Domingo, on ne doit pas moins se préoccuper de cet état d’hostilité permanente et tracassière, ne fût-ce qu’au point de vue du déplorable résultat qu’elle produit, celui d’arrêter le développement régulier et fécond de l’une des plus belles terres du globe.


IV. – DE LA SITUATION ACTUELLE ET DE SES CAUSES.

Si l’on a suivi avec attention et dans toutes ses phases la situation que nous avons essayé de décrire, on aura été frappé d’un fait qui domine et qui explique peut-être tant d’agitations infécondes : c’est la lutte obstinée et malheureuse des hommes de race mulâtre contre des difficultés toujours renaissantes. On sait comment mourut Pétion, comment tombèrent Boyer et Rivière-Hérard. On a vu le premier de ces chefs se consumer et s’éteindre en stériles efforts pour donner au pouvoir l’unité qui fait la force. On a vu son successeur, après avoir sapé à son profit, avec une infatigable persévérance, toutes les institutions démocratiques de son pays, ne s’élever à l’autocratie que pour se condamner aussitôt à une inexplicable immobilité. On a vu enfin deux hommes nouveaux prendre sa place, forts de l’union que resserrait entre eux une étroite parenté : l’un, suppléant par son dévouement et par une certaine honnêteté de cœur à ce qui lui manquait du côté de l’intelligence ; l’autre, que ses concitoyens citaient avec orgueil, esprit sérieux et cultivé, qui avait étudié le mécanisme des sociétés européennes et médité l’histoire de sa patrie, entrant dans la carrière peut-être avec moins d’abnégation personnelle, mais avec la même confiance et le même besoin de succès. La moitié d’une année ne s’est pas écoulée que ces deux hommes, la tête et le bras de la révolution, proclamés la veille les sauveurs de la patrie, les restaurateurs de la liberté, sont balayés du sol et emportés par le plus bizarre des reviremens. Il y a, nous le répétons, dans cette déplorable succession d’avortemens et de luttes, un enseignement qu’il importe de dégager. Deux causes expliquent la situation de la république d’Haïti, une cause politique, une cause morale : la cause politique, c’est le débordement de la démocratie poussée à ses dernières exagérations ; la cause morale, c’est le malheureux antagonisme de deux races qui n’ont pu jusqu’ici trouver leur équilibre. Parlons d’abord de la cause politique.

Pétion jeta le premier la semence républicaine sur le sol haïtien. Luttant