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jette sir Robert Peel. Un jour pourtant, au début de l’affaire de Taïti, le premier ministre avait prononcé des paroles qui pouvaient paraître imprudentes et légères ; mais le premier ministre connaissait son monde, et savait de quel ton il faut parler à certaines personnes pour se faire entendre d’elles. Dans cette circonstance, comme dans toutes les autres, l’évènement lui donna raison, et sur Taïti, aussi bien que sur le Maroc, l’opposition fut forcée de convenir que les intérêts et l’honneur du pays avaient été dignement défendus. Elle ne put non plus blâmer le dernier traité de visite, qui, sir Robert Peel le démontra facilement, était plus efficace, et en définitive, sans blesser la France au même point, plus favorable à l’Angleterre que le traité précédent. Aucun vote d’ailleurs à demander sur la Grèce, sur la Syrie, sur le Texas, puisque sur la Grèce, sur la Syrie, sur le Texas, il n’existait au fond aucune différence entre la politique ministérielle et la politique de l’opposition. Pas un mot à dire sur l’Orégon après la déclaration si fière, si décisive, de lord Aberdeen et de sir Robert Peel. Dans sa détresse, il ne restait plus à lord Palmerston qu’une ressource, celle de démontrer que le cabinet négligeait sur terre comme sur mer l’armement du pays, et que la marine française particulièrement était incomparablement supérieure à la marine anglaise. C’est à cette démonstration qu’avec l’aide de son ami sir Charles Napier, lord Palmerston consacra cinq ou six séances au moins. Il faut reconnaître qu’il soutint la gageure avec beaucoup d’esprit, beaucoup de talent, et plus encore de persévérance. Malgré cela, ni le cabinet, ni la chambre, ni le pays ne purent prendre la chose au sérieux.

Trois questions extérieures, bien que l’esprit de parti ne s’en soit point emparé, méritent pourtant d’être examinées à part en quelques mots, celle du Canada, celle des réclamations espagnoles, celle du traité avec le Brésil.

On sait qu’en 1842, contrairement à la vieille politique anglaise, le gouverneur tory du Canada, sir Charles Bagot, avait cédé à la chambre canadienne et consenti à prendre le pouvoir exécutif au sein de la majorité. On sait qu’en conséquence un des chefs du parti français M. Lafontaine, et le chef du parti radical anglais, M. Baldwin, étaient devenus ministres. Sir Charles Metcalfe, qui succéda à sir Charles Ragot, essaya de gouverner d’après le même principe ; mais un beau jour on apprit que, M. Lafontaine et M. Baldwin ayant demandé que toutes les nominations se fissent en conseil, et qu’en conseil aussi se décidât la question de savoir si la sanction royale serait dominée ou refusée, sir Charles Metcalfe avait résisté et accepté la démission