formelle que la loi des céréales n’était pas à la veille d’être une seconde fois modifiée mais sir Robert Peel refusait de prendre pour l’avenir aucun engagement, ce qui ne laissait pas d’être assez inquiétant. Quant au budget, il ne se présentait point cette année, comme deux ans auparavant, avec une escorte effrayante de droits protecteurs réduits et de prohibitions supprimées. Néanmoins, quelques mesures partielles, l’abolition du droit sur les laines étrangères, par exemple, et la réduction du droit sur le café, annonçaient suffisamment que sir Robert Peel persistait dans son système, et qu’il comptait, quand le moment viendrait, le pousser plus avant. Tout cela produisait dans les rangs tories une agitation sourde, une fermentation secrète, qui, pour éclater au dehors, n’attendait qu’une occasion favorable. Deux fois cette occasion se présenta, et deux fois elle fut saisie. Deux fois aussi la révolte fut réprimée avec une impitoyable rigueur. Ce sont les deux épisodes les plus curieux, de cette session, d’ailleurs assez insignifiante. Il est nécessaire de s’y arrêter un moment.
Depuis plusieurs années, on le sait, d’honorables philanthropes, après avoir sondé les vices et les misères qu’enfante ou qu’aggrave la réunion d’un grand nombre d’ouvriers de tout sexe et de tout âge dans les manufactures, s’étaient proposé de remédier autant que possible à ces vices et à ces misères, en soumettant à quelques règles législatives la puissance des maîtres ; mais le principe de la concurrence et de la liberté du travail opposait à ces efforts isolés une résistance presque invincible, quand tout à coup la question prit un caractère politique. La ligue contre les céréales, qui se compose surtout de manufacturiers et d’industriels, accusait les propriétaires fonciers de vouloir affamer le peuple à leur profit, et d’être ainsi la cause principale de la détresse du pays. Les propriétaires fonciers, à leur tour, trouvèrent bon d’user de représailles en accusant les manufacturiers et les industriels d’exploiter, d’épuiser, de torturer le peuple ; afin d’obtenir de plus gros bénéfices. Les philanthropes sincères trouvèrent ainsi dans l’intérêt personnel un secours inattendu, secours dont ils profitèrent avec raison. Quand, à la suite d’enquêtes ordonnées et faites par le parlement, sir James Graham proposa de limiter à 12 heures le temps de travail des femmes et des adultes, un des hommes les plus respectés du parti tory, lord Ashley, combattit donc cette motion, et demanda que la chambre substituât 10 heures à 12. C’était une innovation considérable qui modifiait profondément les conditions du travail en Angleterre, et qui pouvait avoir, soit au dedans,