À un autre bout de l’Amérique, une autre question s’agite, et se terminera, nous l’espérons, sans grande effusion de sang. Nous voulons parler de la querelle entre le Mexique et les États-Unis au sujet du Texas. Là aussi, les gouvernemens de France et d’Angleterre ont paru un moment vouloir prendre fait et cause pour l’une des parties ; mais, Dieu merci, ils se sont arrêtés à temps. Il importe sans doute aux deux grandes puissances de l’ancien monde qu’il ne se forme pas dans le nouveau une puissance trop prépondérante ; cependant, lorsque la France et l’Angleterre ont donné des avertissemens, lorsqu’elles ont tenté un effort moral, elles ont fait assez. Il est inutile qu’elles poussent plus loin une intervention qui, d’ailleurs, en devenant blessante pour les États-Unis, serait contraire au véritable intérêt de la France. Au bout du compte, le Texas, le Mexique, le États-Unis, sont des états indépendans. Ils ont, les uns et les autres, le droit de faire des fautes, et quand la politique de non-intervention prévaut en Europe, il serait peu conséquent d’adopter le principe contraire vis-à-vis de l’Amérique. La Plata est une exception : c’est assez d’une.
Nous avons applaudi à l’annexion du Texas. Nous l’avons jugée comme la conséquence nécessaire de ce mouvement irrésistible qui porte la race anglo-américaine dans les déserts du Nouveau-Monde pour les civiliser et les féconder par son génie colonisateur. On ne peut disconvenir néanmoins que l’annexion offrira plus d’un inconvénient aux deux parties contractantes. Le Texas y perd son rang parmi les nations, il s’abdique lui-même, il livre ses douanes à la législation générale de l’Union. Il y gagne sans doute d’être couvert contre le Mexique par l’épée de la confédération, mais il n’avait pas besoin de cette défense, puisque la France et l’Angleterre avaient obtenu pour lui la reconnaissance du Mexique. Quant aux États-Unis, le Texas sera pour eux un foyer de contrebande ; il augmentera dans le congrès le nombre des états à esclaves ; il sera un renfort pour les pays du midi contre les pays du nord ; il ajoutera un nouveau poids pour entraîner la république dans la voies des conquêtes ; il sera un des élémens qui amèneront un jour peut-être la rupture de l’Union.
Les dernières nouvelles de Galveston annoncent qu’il se forme en ce moment au Texas un assez grand parti pour demander que la nouvelle république soit comptée dans la confédération pour deux états au lieu d’un. Cette prétention, qui ne laisse pas d’être assez justifiée par l’étendue du Texas, va porter dans la question une complication de plus. Ce serait un coup de partie pour les états à esclaves, qui se trouveraient, alors avoir acquis deux appuis à la fois. Le reste de l’Union s’en accommoderait probablement fort mal, et si la proposition prend de la consistance, elle soulèvera une opposition des plus vives. Cet embarras ne sera pas le dernier. Si les États-Unis veulent avoir le Texas, il faut qu’ils travaillent à le conquérir, non-seulement sur le Mexique, mais sur les sauvages qui occupent une grande partie de son immense territoire, et qui n’ont pas voté l’annexion comme les chambres texiennes ; il faut qu’ils se débarrassent des bandes de vagabonds et de mal-