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Salut à vous de la part du peuple russe,
De la part de son empereur et de ses nobles !
Vous avez la même origine que nous :
Pourquoi n’avez-vous pas le même souverain ?

Autrefois, dans les vieux temps,
Les Slaves vivaient en frères.
Ainsi que l’oiseau, ils aimaient la liberté ;
En tout ils suivaient les mêmes lois.

Mais le bonheur ne peut durer toujours ;
Le Slave devait finir par éprouver un sort fatal.
Et voilà que, de l’une à l’autre mer,
On entend l’appel au fratricide !

Une tribu court contre l’autre ;
Le frère a levé l’épée contre le frère ;
Les têtes tombent comme l’herbe ;
On quitte le monde où l’on n’a pas grandi.

Nos ennemis n’attendaient que cela.
Ils arrivent comme des loups affamés ;
Ils déchirent les mères, les pères, les enfans,
Et le Slave, né pour la liberté, gémit dans les fers.

Au nord, il fut esclave du Tartare ;
Au midi, il est sujet du Turc.
Au centre, il est soumis au Madjiard ;
Avec l’Allemand, il s’est germanisé.

En vain on a cherché à lui rendre sa liberté perdue.
Ici, Zisca et le téméraire Podiebrad,
Là, George et les Monténégrins se sont battus,
Et néanmoins le Slave est dans la servitude.

Le Russe seul a brisé ses fers !
Libre, heureux, fier et puissant,
En lui l’esprit slave ressuscite,
Et du milieu des nuées il lance la foudre.

Quand il paraît, les nations tombent la face contre terre,
Le Mongol, le Persan, le Tartare, l’Arabe,
Les Français et les Allemands ont éprouvé sa valeur,
L’Ottoman est devenu son esclave soumis.

Il est temps, il est temps pour vous, Slaves,
De commencer l’œuvre de l’indépendance ;
Les Russes vous apprendront
Où et comment on en trouve le chemin.

Jusqu’ici nous n’avons cherché la liberté
Que pour notre terre natale et pour nous-mêmes ;
Mais enfin le temps est arrivé
De la chercher pour nos frères.

Qu’aucun de nous, chers frères, n’oublie