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l’agriculture et l’industrie n’ont pris aucun essor. Jetez au Mexique un surcroît considérable de population européenne, et aussitôt une foule de nécessités nouvelles seront révélées aux Mexicains ; le travail et la production augmenteront à l’intérieur pour les satisfaire, et le commerce se développera dans une proportion analogue. Toute l’Europe profitera de ce supplément de consommation, mais le commerce et l’industrie française en auront la meilleure part, leurs produits s’adressant spécialement aux pays où règne une civilisation avancée. L’Angleterre et les États-Unis fournissent à peu près seuls aux besoins des nations arriérées ; à mesure que les peuples se civilisent, l’introduction des marchandises françaises augmente chez eux, sans que l’importation anglaise ou américaine suive une progression égale.

Quant aux avantages exclusivement réservés à la France, on devine qu’ils seraient purement politiques. Si la nation mexicaine devenait, grace à nous, riche et puissante, la France aurait désormais les moyens d’arrêter en Amérique les envahissemens de l’Angleterre et de l’Union. Mise en état désormais de se défendre par elle-même, cette république deviendrait la protectrice naturelle des nations espagnoles du Nouveau-Monde. Ainsi la France aurait assis à jamais son influence dans ces pays où on doute aujourd’hui de sa force. Si au contraire on veut se borner, comme en 1838, à une simple démonstration, qui n’aurait d’autre effet que d’irriter les passions mexicaines, sans nous assurer aucun avantage, aucune garantie, mieux vaudrait, nous le croyons, déclarer nos relations avec la république, à jamais rompues, et attendre, pour renouer des rapports avec les états mexicains, qu’ils eussent été incorporés à l’Union ou vendus à l’Angleterre.


FÉLIX CLAVÉ.