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fédération, vient d’être renversé au commencement de l’année 1845 dans la personne du même général. À ce parti, dont le nom indique suffisamment les tendances, appartiennent la grande majorité du clergé, qui demande avant tout le maintien de ses privilèges ; les généraux, qui trouvent trop limité pour leur ambition le gouvernement d’une province, et désirent tous plus ou moins arriver au fauteuil de la présidence ; les agioteurs, les banquiers, les grands spéculateurs de toute espèce qui, dirigeant leurs principales opérations sur les fournitures, les emprunts du trésor, la contrebande, en un mot sur la vénalité et la corruption, trouvent plus facile de séduire un gouvernement central que d’avoir successivement affaire à plusieurs gouvernemens provinciaux. Les spéculateurs, les banquiers, forment, comme détenteurs du numéraire, la principale force du parti ; ils ont toujours à sa disposition des capitaux qu’il leur est facile de décupler en peu de temps, soit par le remboursement que leur influence sait obtenir de créances sur le trésor livrées à vil prix par des malheureux, soit par l’achat de terres des domaines qu’ils se font livrer moyennant un modique pot de vin, soit par l’exemption de droits de douane qu’ils se procurent à bon marché, soit enfin par un de ces mille moyens que la fraude invente pour séduire l’avarice puissante. Au-dessous de l’aristocratie financière s’agite le menu peuple du parti : ce sont pour la plupart des adhérens du clergé qui croient la religion menacée à chaque nouvelle secousse de l’état. Les agioteurs et les militaires sont la force active de l’opinion absolutiste ; le clergé constitue sa force morale. Ce parti, le plus corrompu des trois, le plus opposé aux véritables intérêts du Mexique, est aussi celui qui a disposé jusqu’à ce jour de la plus grande influence.

Le parti modéré, qui est actuellement aux affaires, cherche un juste milieu impossible entre la fédération et le centralisme ; il voudrait conserver une direction unique, tout en créant des juntes départementales qui annuleraient à peu près l’action du pouvoir central. Cette conciliation d’élémens incompatibles est le rêve de quelques imaginations débonnaires, qui ne voudraient ni la corruption et la marche rétrograde de l’absolutisme, ni le mouvement prononcé de la fédération et les troubles qu’entraîne l’appel de tous les citoyens aux affaires publiques. Le gouvernement des modérés est l’anarchie de la faiblesse. Trop honnêtes pour comprendre la dépravation mexicaine, ils se laissent duper par elle sans savoir s’en faire un appui, à l’exemple de Santa-Anna et des centralistes purs. D’une probité avérée, ils pourraient sauver le pays, si le courage et l’intelligence étaient chez eux à la hauteur de la vertu. Faute d’énergie et de lumières, ils ne font que précipiter la nation vers sa ruine. Ce parti se compose de vieillards élevés sous la férule des Espagnols ; il leur semble toujours avoir derrière eux Ferdinand VII et l’inquisition. Le type des hommes de cette opinion est le président actuel, le général Herrera.

Le parti fédéraliste on libéral aspire à remettre les choses dans l’état où elles étaient en 1834. Il voudrait que chaque province eût sa représentation