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part le pont de ce nom qui traverse le précipice, et est supporté par deux rangs d’arches superposées. Plus à droite encore s’élèvent les hauteurs de Sidi-Mécid, dont les pentes inférieures sont couvertes de cactus. Nous avions en face de nous et légèrement à notre gauche, mais dans un plan beaucoup plus éloigné, la colline de Coudiad-Aty, qui fait face au front sud de la ville, celui Bab-el-Oued. Le côté occidental de Constantine regarde les hautes montagnes de l’Atlas. Deux des assises du plateau de Sattah-Mansourah sont défendues par des rochers tout-à-fait inabordables. Son arête extrême, celle qui fait face à la ville, peut avoir environ quatre cents mètres de développement, mais le plan va en s’élargissant à mesure qu’on s’éloigne de Constantine, et qu’en lui tournant le dos on s’approche de Sidi-labrouk. A l’angle saillant de ce bastion naturel se trouvent les restes d’une redoute en étoile, dite redoute tunisienne, parce qu’elle avait été construite en 1760 par un bey de Tunis, qui vint mettre le siége devant Constantine, mais fut complètement battu et contraint de fuir avec son armée, dont une grande partie fut taillée en pièces. C’est en souvenir de cette défaite que les habitans de la ville donnèrent au plateau le nom de Sattah-Mansourah, ce qui veut dire le toit de la victoire.

La brigade de Nemours occupa la partie droite du plateau opposé aux hauteurs de Sidi-Mécid, et qui n’en est séparée que par un étroit vallon. Le général en chef avait eu d’abord la pensée de placer son quartier-général dans la redoute tunisienne ; mais comme les bombes de la place y tombaient sans cesse, il fut forcé de s’établir à deux kilomètres plus en arrière, dans les jardins de Sidi-Mabrouk. L’ennemi s’était depuis long-temps exercé à tirer sur le Mansourah, car nous trouvâmes partout des ricochets de boulets et des trous de bombes.

Toute la matinée, le feu de la place fut très nourri, et les artilleurs d’Achmet montrèrent assez d’adresse. Le front qui nous faisait face était armé de deux batteries seulement, l’une de canons, située à la porte d’El-Kantara, l’autre de canons et de mortiers placée à la kasbah. Le reste de l’armement de la place était accumulé sur la partie de l’enceinte opposée au Coudiad-Aty, la seule, comme nous l’avons dit, qui ne fût pas soutenue par des rochers inaccessibles, et par conséquent la seule attaquable.

On décida immédiatement la construction de trois batteries : l’une, la batterie royale, établie à mi-côte du Mansourah, fut destinée à ruiner les défenses du front d’attaque de Bab-el-Oued, qu’elle devait prendre à revers. La batterie d’Orléans eut pour mission de contre-battre