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À trente ou quarante milles plus loin, on leur applique indifféremment les trois noms de Anégoundi, Viroupacsha ou Humpi. Ce devrait être Pompa, du nom d’une déesse dont ces montagnes étaient le séjour favori ; mais les habitans du Carnate en ont fait par corruption Hompa, et les Anglais Humpi. Ce n’est plus que dans l’histoire et dans les légendes que l’on retrouve l’ancien nom de Vijayanagar.

Il est dit dans les chroniques que Viroupacsha, le plus considérable des deux temples qui subsistent encore à quelques pas de la rive méridionale du Tombouddra, à 15° 14’ de latitude nord et à 76° 34’ de longitude est (de Greenwich), occupait précisément le centre de la ville, qui s’étendait, à partir de cet édifice, à environ deux lieues dans toutes les directions. Le second temple se trouve à environ 800 mètres à l’est du premier, près d’un point où la rivière, tournant brusquement vers le nord, se fraie un passage de sept à huit cents pas parmi des rochers de granit, et reprend ensuite son cours naturel vers l’orient. Ces deux monumens sont les mieux conservés de toutes ces ruines, et cependant la tradition leur attribue une date fort antérieure à celle de la fondation de Vijayanagar. Le premier de ces temples est dédié à Siva sous le nom de Viroupacsha, ou la déité dont on ne saurait supporter le regard ; l’autre à Vishnou, sous le nom de Vitaladeva ou Rama-Chandra, l’un de ses avatars.

César Frédérick, un voyageur qui s’arrêta quelque temps à Vijayanagar vers le milieu du XVIe siècle, donne à cette ville dix lieues de circonférence. D’après mes propres observations, je lui en accorderais davantage, et je crois qu’il a voulu parler d’une des enceintes intérieures ; car la muraille fortifiée de Belaldéo, que l’on peut suivre dans presque tout son développement, et dont les arcs de triomphe subsistent encore, se retrouve à l’est, à l’ouest, au sud-est, au sud-ouest et au nord, toujours à la même distance, au moins deux lieues, du temple de Viroupacsha. Quel que soit le point de vue d’où l’on examine cette enceinte, elle paraît interminable, et l’on dirait une œuvre de géans. Ce sont des pierres colossales de trente pieds de long sur dix de large couchées transversalement les unes sur les autres, et que leur masse seule suffirait pour conserver debout jusqu’à la fin des siècles. Les enceintes intérieures, au nombre de six, ont laissé beaucoup moins de traces, mais on les retrouve encore en cherchant avec un peu d’attention.

La cité, de forme hexagonale, était divisée, sur les deux rives du Tombouddra, en différens quartiers, dont chacun à son tour avait été le siège du pouvoir. Ces quartiers recevaient chacun un nom particulier,