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REVUE DES DEUX MONDES.

La verve inépuisable et rayonnante de Voltaire, l’universalité de ses connaissances, son activité surhumaine, tout cela était certes bien fait pour tenter l’imagination du noble ex-chancelier. Lord Brougham est voltairien, mais en repoussant toute attaque à la religion comme à la morale, voltairien de cette profession de foi qu’émettait l’autre jour M. Thiers à la tribune de la chambre.


— Le Tyrol est un pays plus connu des poètes que des touristes. Goethe lui a consacré quelques-unes des plus fraîches pages de son Voyage en. Italie. M. Alfred de Musset, on s’en souvient, l’a chanté en beaux vers, et l’auteur des Lettres d’un Voyageur a su traduire avec éloquence les impressions qu’éveillait dans son ame la majesté des Alpes tyroliennes. À côté de ces inspirations gracieuses ou magnifiques, nous avons maintenant, grace à M. Mercey, les observations d’un voyageur spirituel et décidé à être vrai avant tout. Son ouvrage sur le Tyrol et le nord de l’Italie[1], dont la seconde édition vient de paraître, est un agréable recueil de souvenirs et de récits de voyage, qui cache souvent des notions curieuses, des renseignemens pleins d’intérêt, sous l’attrayante légèreté de la forme. C’est mieux que le journal d’un touriste, c’est le livre d’un esprit juste et d’un observateur pénétrant. L’auteur du Tyrol ne s’occupe pas seulement de décrire le pays et de noter les mille incidens de la route ; il s’attache aussi à donner une idée exacte du caractère et des mœurs de la population. À ce titre, l’ouvrage de M. Mercey méritait d’être soumis à cette périlleuse épreuve de la réimpression, qui en pareil cas ne peut être que l’occasion d’un nouveau succès.


Le Foyer breton, de M. Émile Souvestre[2], ne doit pas être confondu avec les innombrables publications dont la Bretagne ancienne et moderne a été le sujet depuis quelque temps. L’auteur a pour sa province un amour sérieux et discret, qui ne rappelle en rien les engouemens frivoles dont tant d’écrivains semblent aujourd’hui possédés. Le livre qu’il vient de publier est un complément ou plutôt un commentaire dramatique des Derniers Bretons ; c’est un choix de contes populaires, encadrés dans un tableau fidèle et animé de l’auditoire auquel ils s’adressent. D’élégantes illustrations accompagnent le texte, et traduisent souvent avec bonheur la pensée de l’écrivain. On doit souhaiter que l’exemple de M. Souvestre soit suivi, et que de patiens érudits cherchent à grossir, après lui, le nombre de ces traditions orales, répétées depuis tant de siècles au foyer du paysan breton, et pleines d’indications précieuses sur l’histoire du vieux duché.



V. de Mars.
  1. Deux volumes in-8o, chez Arthus Bertrand, rue Hautefeuille.
  2. Un volume in-8o, chez Coquebert, rue Jacob.