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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 mai 1845.


Quelques bonnes ames pensaient que la question des jésuites mettrait le feu dans le parlement. On espérait que la chambre des députés serait passionnée, violente ; on comptait sur une discussion orageuse. Un peu de scandale aurait si bien servi les intérêts de certaines gens ! Heureusement la chambre a démenti ces espérances sinistres. Calme et impartiale, elle a jugé froidement la cause débattue devant elle. Sous l’impression de la parole éloquente et sage de M. Thiers, elle a pris une résolution digne d’un grand corps politique qui connaît toute l’étendue de ses devoirs.

Depuis trop long-temps, une question bien simple semblait se compliquer et s’obscurcir, grace à la faiblesse du pouvoir et à l’audace toujours croissante du parti ultramontain. Cette question est décidée aujourd’hui. Après le discours de M. Thiers et les aveux tardifs de M. le garde-des-sceaux, après les énergiques paroles de M. Dupin et de M. Barrot, après la profession de foi que M. Hébert, le chef du parquet de Paris, s’est cru forcé de faire pour protester contre un scandale récent, on ne demandera plus où sont les lois qui ferment la France à la congrégation des jésuites. Ces lois, elles sont partout. Nous avons les arrêts des parlemens et les édits royaux, les lois de l’assemblée constituante et de 1792, les lois de l’empire et de la restauration. Veut-on des lois nouvelles ? Nous avons la loi des associations. Dira-t-on que les jésuites établis en France ne forment pas une association, que ce sont des individus isolés, sans chefs, étrangers à toute action comme à toute direction commune ? Quelle dérision ! Toute l’habileté des jésuites ne réussira jamais à faire triompher de pareils argumens. Oui, les lois existent. Toute une législation est là pour frapper les jésuites dès qu’on le voudra. Mais le