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hommes instruits aient laissé périr les écrits les plus importans de Fermat.

Cependant, lorsqu’il s’agit de manuscrits, on ne doit jamais désespérer de rien. Souvent ce qu’on croit perdu n’est que caché, et il ne faut pas oublier que les manuscrits autographes de Galilée, que sa correspondance inédite, qu’on supposait depuis long-temps anéantie ont été retrouvés un beau jour dans la boutique d’un charcutier auquel un domestique, qui les avait découverts dans un vieux silo, les vendait au poids. La correspondance originale que Peiresc entretenait avec tous les savans de son temps, correspondance précieuse dont depuis plus d’un siècle on a déploré la perte dans vingt ouvrages divers, et qu’on prétendait avoir été transformée en papillotes par une nièce du célèbre magistrat d’Aix, se trouve depuis longues années à la Bibliothèque royale de Paris, où tout le monde peut la voir ! De tels faits sont bien propres à soutenir le zèle des personnes qui ne désespèrent pas de découvrir des manuscrits importans égarés dans ces derniers siècles.

Le hasard parfois se charge de révélations inattendues. Nous avions, comme tant d’autres, fait d’inutiles tentatives pour retrouver dans les grands dépôts littéraires de la France et de l’Italie quelques-uns des manuscrits inédits de Fermat ; nous savions qu’à la bibliothèque de Toulouse on ne conserve qu’une note écrite par Fermat en tête d’un exemplaire des Dialogues de Galilée, et nous n’avions guère l’espoir de faire quelque intéressante trouvaille à cet égard, lorsqu’il y a six ans un libraire parisien, M. Cretaine, nous communiqua une note informe qu’il avait reçue de la province, et dans laquelle se trouvait l’indication de plusieurs manuscrits qui étaient à vendre chez un bouquiniste de Metz Les premiers mots sur lesquels s’arrêtèrent nos yeux furent ceux-ci : Manuscrits inédits de Fermat ! On pense bien que nous ne perdîmes pas de temps. Grâce à l’obligeante intervention d’un professeur distingué de l’école de Metz, M. Didion, vingt lettres scientifiques inédites de Fermat, et huit opuscules mathématiques également inédits de ce grand géomètre, se trouvèrent bientôt en notre possession. On comprendra toute l’importance de cette découverte lorsqu’on saura que ces écrits pourront augmenter de deux tiers environ les travaux de Fermat contenus dans les Opera varia.

Nous ajouterons en passant que ces manuscrits ont appartenu à Arbogast, ancien membre de la convention nationale et savant géomètre, qui avait copié de sa main plusieurs lettres de Fermat à Mersenne qu’il paraît avoir trouvées, du temps de la révolution, dans la