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géomètres seuls le soin de rendre honneur à la mémoire d’un des plus grands esprits que la France ait enfantés. La surprise qu’à la chambre des députés excita le projet de loi présenté dans ce dessein par M. Villemain a dû prouver, mieux que tout ce qu’on pourrait en dire, l’opportunité d’une telle détermination.

La vie de Fermat est à peine connue. M. Maurice, habile mathématicien, auquel on doit une notice fort intéressante sur les travaux de Fermat, a fait laconiquement sa biographie en ces termes : « Pierre de Fermat naquit à Toulouse vers l’an 1595 et y mourut en janvier 1665, âgé de soixante-dix ans. Il paraît qu’il quitta fort peu sa patrie[1], où il était pourvu d’une charge de conseiller au parlement, qu’il y laissa la réputation d’un magistrat intègre et dévoué à ses devoirs, et qu’il passa même pour un des plus grands jurisconsultes de son temps. C’est là tout ce qu’on sait aujourd’hui des évènemens de sa vie. » En annonçant la mort de Fermat, le Journal des Savans du 9 février 1665 n’en dit guère davantage, et l’on doit ajouter que, quoique très succincte, la biographie donnée par M. Maurice est loin d’être établie d’une manière incontestable. Ainsi, tandis que Genty, dans un discours couronné en 1783 par l’Académie de Toulouse, et qui a pour titre : l’Influence de Fermat sur son siècle, fait naître en 1590 et mourir en 1664 ce grand géomètre, l’inscription placée en 1782 sur le tombeau qui était dans l’église des Augustins à Toulouse, et qui fut profané en 1794, porte que Fermat mourut le 12 janvier 1665, à l’âge de cinquante-sept ans. Cette inscription existe encore ; nous l’avons vue récemment au musée de Toulouse.

Ces doutes, ces incertitudes, paraissent enfin devoir se dissiper. Des recherches entreprises à l’occasion de la loi concernant la publication des œuvres de Fermat ont fait découvrir à Beaumont-de-Lomagne des actes authentiques qui semblent prouver que Fermat n’est pas né à Toulouse et qu’il a vu le jour à Beaumont, dans le mois d’août 1601. Bien que, dans l’esprit de certaines personnes, il puisse rester encore à

  1. On ignore si Fermat vint jamais à Paris. Dans une de ses lettres, il propose à Pascal de faire chacun la moitié du voyage et de se rencontrer entre Clermont et Toulouse, pour converser quelques jours ensemble. Dans sa Vie du père Mersenne, le père Hilarion Coste cite Fermat parmi les personnes qui visitaient Mersenne ; mais ce fait est-il bien avéré, et ne se rapporte-t-il pas d’ailleurs à une époque où Mersenne aurait été en voyage ? Dans la même lettre, qui est du 25 juillet 1660), Fermat écrit à Pascal : Ma santé n’est guère plus forte que la vôtre. Il souffrait peut-être encore des suites de la peste qui désola le Languedoc vers le milieu du XVIIe siècle, et dont une lettre de Bernard Medon, publiée par Burimann, nous apprend que cet illustre géomètre fut atteint.