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Après avoir ainsi amusé sa vie, il fallut mourir ; les papiers testamentaires du collecteur renfermaient la note suivante : « On trouvera dans ma bibliothèque de Strawberry-Hill deux malles ou boîtes en ébénisterie, une grande marquée A et une petite marquée B. Je désire qu’aussitôt après ma mort, mes exécuteurs testamentaires lient fortement et cachètent avec de la cire la grande boîte marquée A, qui doit être remise aux mains de l’honorable Hugues Conway Seymour, et gardée par lui sans être ouverte ou décachetée jusqu’à l’époque où l’un des fils de lady Waldegrave, devenu lord Waldegrave, aura vingt-cinq ans ; alors seulement la boîte et tout ce qu’elle contient seront remis à ce dernier comme sa propriété. Je prie en outre l’honorable Hugues Conway Seymour de signer et de donner à lady Waldegrave, au moment où la boîte en question lui sera remise, la promesse de ne point ouvrir ou décacheter cette boîte, et de la remettre au représentant de la famille Waldegrave, lorsque ce dernier atteindra sa vingt-cinquième année. La clé de cette boîte est sur une des tablettes du cabinet vert, au château de Strawberry-Hill ; je désire qu’elle reste entre les mains de Laure, lady Waldegrave, jusqu’au moment où son fils deviendra propriétaire de la boîte. »

Dans la boite A se trouvait déposée toute l’histoire anglaise du XVIIIe siècle. Grace à ces précautions minutieusement caractéristiques, lord Holland, un des hommes de notre temps les plus dignes d’estime par leurs lumières et leurs qualités morales, est devenu, en 1822, l’éditeur de la première partie de ces mémoires posthumes, embrassant les dix dernières années du règne de George II[1].

La suite de ces mémoires vient de paraître[2], un peu tard assurément, mais la vérité de l’histoire n’arrive jamais trop tard. Il faut y joindre les Réminiscences du même Horace, ses délicieuses lettres, toutes semées de faits et de portraits, ses catalogues même avec la curieuse malignité de leurs notes, si l’on veut poursuivre dans son détail l’histoire secrète des règnes hanovriens, de ce que les Anglais appellent l’ère géorgienne (georgian era). Comment ces tristes rois se sont-ils maintenus avec tant de succès, au milieu de tant de mépris ? Quel a été le secret de leur force ? Quelles ont été la valeur et l’œuvre de leurs ministres et de leurs généraux, depuis Marlborough jusqu’au second Pitt ? Si toutes ces questions ne sont pas doctrinalement résolues par Horace, s’il n’a pas cette prétention systématique dont le

  1. Memoirs of the last ten years, etc. London, in-4o, 1828.
  2. Memoirs of the reign of George the III, 1845.