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à l’espoir d’un arrangement pacifique, Pitt comprit que son premier devoir était de se préparer aux chances d’une rupture dont les grands préparatifs faits dans les ports espagnols annonçaient la possibilité. Un message royal appela le parlement à délibérer sur la question qui venait de surgir d’une manière si imprévue. La chambre des communes y répondit par le vote unanime d’une adresse qui promettait son concours pour venger les droits du pays dans le cas où l’on n’obtiendrait pas satisfaction à l’amiable. L’opposition ne se sépara pas, en cette circonstance, de la majorité. La chambre des lords vota une adresse semblable à celle des communes, et le ministère obtint sans difficulté les crédits nécessaires pour le mettre en mesure de pourvoir à toutes les éventualités. Secondé par l’élan unanime qui se manifestait dans le pays, il commença aussitôt des arméniens considérables, en même temps qu’il envoyait à Madrid un plénipotentiaire chargé d’y faire connaître les conditions auxquelles il consentirait à traiter. L’Espagne, irritée du ton péremptoire avec lequel ces conditions lui furent notifiées, se montra d’abord peu disposée à les accepter. Aux termes du pacte de famille, elle comptait sur la coopération armée de la France ; mais l’assemblée nationale ayant manifesté peu d’empressement à accorder un appui qu’elle ne déniait pourtant pas d’une manière formelle, le cabinet de Madrid pensa qu’il serait peu prudent de s’aventurer, sur la foi d’une telle alliance, dans une guerre contre la Grande-Bretagne. Les propositions anglaises furent acceptées. Une convention signée à Madrid remit toutes choses sur le pied où elles étaient avant le dernier incident ; elle garantit à l’Angleterre la liberté du commerce sur la côte nord-ouest de l’Amérique, aussi bien que le droit de pêche dans l’Océan Pacifique et la mer du Sud ; les deux états s’interdirent d’ailleurs tout établissement dans. certains parages ; le gouvernement britannique promit, de son côté, d’empêcher tout commerce illicite de ses sujets avec les colonies espagnoles ; enfin, des indemnités furent assurées aux individus qui avaient souffert des violences commises à Nootka-Sound. Cette transaction excita une joie très vive en Angleterre, où l’opinion publique, bien résolue à ne pas reculer devant la guerre, si elle était indispensable pour venger l’honneur et les intérêts nationaux, ne l’eût vue éclater pourtant qu’avec un extrême regret. La Cité de Londres remercia le roi, par une adresse, du succès de la négociation.

Pendant qu’à l’extrémité occidentale du monde on réussissait ainsi à étouffer une querelle qui eût pu entraîner de si graves complications, la guerre se rallumait dans l’Inde orientale entre la compagnie