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que sous les Pharaons, ni à celle des militaires, qui était toujours nombreuse, et où ils puisaient des contingens pour leurs armées[1]. Les collèges des prêtres, à Memphis, à Héliopolis, à Saïs, à Thèbes, étaient encore dans la splendeur ; leur ascendant sur le peuple n’avait souffert aucune diminution. Les fêtes religieuses se célébraient comme auparavant ; Hérodote en admire plusieurs fois le nombre et la variété ; il vante surtout les grandes panégyries de Diane à Bubaste, de Minerve à Saïs, dont la fête se répétait dans toute l’Égypte ; d’Isis à Busiris, de Latone à Buto, du soleil à Héliopolis, de Mars à Paprémis, où plusieurs milliers de prêtres exécutaient les combats prescrits par les rits du dieu. Toutes ces panégyries attiraient une affluence prodigieuse de spectateurs ; à celle de Bubaste, entre autres, il se rendait sept cent mille personnes, tant hommes que femmes, sans compter les enfans.

Voilà les traits caractéristiques du tableau de l’Égypte à l’époque où Hérodote parcourait ce pays. Y reconnaissons-nous une contrée en décadence où les arts, la religion et les institutions nationales s’éteignent étouffées par la violence et la tyrannie d’un vainqueur ? Il est clair que pendant les soixante ans qui se sont écoulés depuis le voyage d’Hérodote jusqu’en 404, époque de l’avènement des dynasties nationales, l’Égypte ne put éprouver aucun changement notable, et que les rois égyptiens la trouvèrent telle qu’Hérodote l’avait vue un demi-siècle auparavant. On doit même s’attendre à ce que le pays éprouva moins de changemens encore sous les dynasties indigènes. C’est ce qui résulte en effet des renseignemens recueillis dans la section suivante.


II. – Depuis l’avènement d’Amyrtée jusqu’à l’arrivée d’Alexandre.

Cette période de l’histoire égyptienne n’est exactement représentée que dans les extraits de Manéthon. Rien ne pourrait faire soupçonner, dans ce qui nous reste des historiens classiques sur cette époque, que l’Égypte, après la mort de Darius II, au lieu de rester, comme par le passé, sous la domination persane, fut gouvernée par des rois tirés de son sein. Ici, l’annalyste égyptien est, sur tous les points, d’accord avec les monumens.

En effet, après la XXVIIe dynastie, qu’il appelle persane, composée de souverains persans, de Cambyse à Darius II, Manéthon compte trois

  1. Herod., VI, 6, 97 ; VII, 89 ; VIII, 17.