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aux femmes vieillies que l’industrie privée repousse, un genre de travail proportionné à leur faiblesse. Un atelier pour la filature à la main a procuré à 4,000 fileuses un bénéfice de 134,725 francs. Les fils ainsi fabriqués sont employés plus tard à la confection des toiles nécessaires aux maisons de bienfaisance. Nous voudrions voir développer une pareille institution, qui ennoblit l’aumône en la présentant comme un salaire.

Personne ne s’étonnera qu’avec tant de souffrances à soulager, tant de misères à secourir, qu’avec une manutention infinie et une comptabilité des plus minutieuses, les besoins de la charité publique soient considérables. Le budget spécial des hospices présente ordinairement, tant en recettes qu’en dépenses, un total de 14 à 15 millions. Ce chiffre, grossi par les fictions de la comptabilité, n’indique pas exactement le mouvement financier. Déduction faite des sommes qui ne figurent que pour ordre, la dépense réelle flotte entre 11 et 12 millions (11,462,743 francs pour l’exercice de 1843). Or, le revenu patrimonial des pauvres est encore bien inférieur à cette somme. Le loyer des maisons, des terres, des capitaux provenant de legs charitables, les réserves faites en leur faveur sur l’octroi, le mont-de-piété, les marchés, les spectacles, ne produisent pas même un total de 7 millions. Le déficit annuel retombe, comme nous l’avons dit, à la charge de la commune parisienne.

De 1820 à 1840, la subvention accordée aux hospices a été en moyenne de 5,620,000 francs, sans compter les sommes employées en constructions et rejetées à un autre chapitre. On a profité des libéralités volontaires faites aux pauvres pour réduire progressivement la charge municipale. En 1843, l’allocation était tombée à moins de 5 millions. Partie de cette somme est destinée spécialement au service des enfans trouvés. L’adoption forcée de ces débiles créatures est un sacrifice auquel l’administration ne se résigne pas sans faire entendre de profondes doléances. Recueillir tous les enfans que le vice ou l’infortune laissent sans familles, leur choisir des nourrices, leur prodiguer les soins qu’exige la première enfance, payer leur pension jusqu’à douze ans, les placer utilement, leur servir de tuteur jusqu’à vingt-un ans, n’est-ce pas une obligation bien grave et bien dispendieuse ? La grande affaire de tous les conseils communaux est d’alléger ce fardeau ; mais que de difficultés dans une réforme qui soulève contre les froids calculs de la prudence administrative les traditions religieuses et les profonds tressaillemens des cœurs charitables ! On sait quelle émotion causèrent, en 1837, les mesures prises pour diminuer