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plus des trois quarts, charge qui leur paraîtrait intolérable si elle était établie directement à titre d’impôt, mais qu’on supporte sans peine parce qu’elle se combine d’une manière imperceptible avec la satisfaction de tous les besoins.

De quelles sources proviennent les revenus de la municipalité parisienne ? quel est l’emploi de ces trésors ? Telles sont les intéressantes questions auxquelles nous allons répondre par une analyse du budget de la ville de Paris. Les comptes financiers publiés chaque année par la préfecture et par les administrations spéciales qui en dépendent nous ont fourni les élémens de cette étude. Souvent aussi nous avons consulté un travail fort instructif de M. Martin Saint-Léon, le Résumé des dépenses et des recettes de la ville de Paris[1] de 1797 à 1840. L’histoire morale et politique d’une société se trouve toujours en grande partie dans celle de ses finances ; ainsi les développemens à l’appui des diverses opérations financières ont fait du livre de M. Saint-Léon une histoire administrative de Paris depuis l’époque de la réorganisation départementale jusqu’à nos jours ; c’est à ce titre qu’un premier essai, publié en 1833, a été jugé digne d’une mention honorable par l’Académie des sciences, quoique bien inférieur à la seconde édition que nous avons sous les yeux.


I – RECETTES

Un des principaux vices de l’ancien régime fut l’irrégularité de son administration. Loin de concourir harmonieusement à la prospérité commune, les magistratures, instituées à diverses époques et souvent en contradiction les unes des autres, ne représentaient que des castes ou des corporations rivales dont la lutte affaiblissait la société. A Paris, par exemple, la gestion des intérêts municipaux était partagée, sans coordination hiérarchique, entre cinq autorités. Le parlement évoquait les affaires de haute police ; le bureau des finances intervenait en matière de grande et de petite voirie. La garde des édifices publics, la surveillance des constructions particulières, appartenaient à la chambre des bâtimens. Le lieutenant-général de police, agent du pouvoir royal, avait des attributions fort étendues qui n’étaient pas bornées, comme aujourd’hui, à la protection des personnes et aux mesures de salubrité. Enfin, les véritables représentans de la cité, le

  1. Un vol. in-4o, seconde édition ; chez Paul Dupont.