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des races progressives et des races arrêtées. Il arrive un moment où l’activité des nations s’épuise : les unes se fixent plus tôt, les autres plus tard. Du degré où elles s’arrêtent résulte leur élévation ou leur abaissement dans l’histoire. Ces races incomplètes, mais achevées dans leur imperfection, survivent quelquefois à leur propre grandeur, comme les ruines survivent au monument d’où elles sont tombées. Leur avenir est l’immobilité. Il y en a qui stationnent alors (c’est le cas des nations mongoles) ; il y en a d’autres qui rétrogradent. L’Afrique est surtout le berceau de ces peuples toujours au même âge ; elle en a d’autres qui, après avoir atteint le degré de croissance des peuples civilisés, reculent de l’état où ils étaient parvenus pour se détériorer ou se détruire. L’Asie, la Chaldée, l’Assyrie nous présentent une image de cette triste métamorphose du temps : l’ame de ces peuples s’est convertie en bête fauve, animafiera divenuta. Ces races arrêtées sont mortes pour la civilisation. Elles disparaîtront infailliblement du globe, à moins de l’intervention d’une nation civilisée. Des races stationnaires pendant des siècles, parce qu’elles avaient épuisé la série de leurs développemens, et qu’elles étaient incapables par leurs propres forces d’aller plus loin, peuvent reprendre un nouveau mouvement, si elles viennent à s’unir avec des races en progrès. La France est, nous le croyons, prédestinée à cette œuvre qu’allons-nous faire à notre insu dans l’Algérie ? Ressusciter l’Afrique. La race sémitique est une de ces races fortes qui, après avoir fait leur temps, s’usent et tombent. Sa civilisation a précédé la nôtre et avait même jeté un grand éclat : cet éclat est fini ; mais il peut renaître. Il dépend de nous de communiquer aux Arabes de nouvelles forces pour continuer leur progrès. La France gagnerait de son côté à retremper la fibre molle de ses habitans du nord dans cette nature sèche et bouillante de l’Atlas. Il cri est des races comme des individus ; il y a chez elles déperdition de forces, l’action leur enlève chaque jour de leur puissance ; il faut alors que, pour se conserver et s’accroître, elles puisent sans cesse dans les autres races les élémens de leur vitalité. Le type arabe est magnifique et répond assez bien au type français ; nous avons reconnu notre image dans cette race nerveuse qui se nourrit de ses luttes et qui s’endurcit de ses cicatrices. Lien naturel des peuples de notre continent avec ceux de l’extrémité de l’Afrique, l’Arabe nous initie à une plus ample conquête. Le chemin est désormais tracé à notre influence sur cette terre, berceau et patrie de la race noire. Napoléon nous a ouvert l’Égypte avec son