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très voisins, le croisement donne naissance à des métis dont la fécondité s’arrête à la première ou à la seconde génération. L’unité humaine se manifeste dans un autre fait que la science a recueilli quand le mélange de deux individus de races diverses est fécond, la race supérieure fournit au moins les deux tiers à la nature du produit. Ce mouvement a été observé avec attention. M. Serres a reconnu que la race caucasique imprime son cachet sur les races qu’elle touche ; elle descend d’abord un peu ; mais, à la quatrième, cinquième ou sixième reproduction, elle remonte et ramène à elle tous les autres types. Qui ne prévoit déjà les conséquences philosophiques de ce fait d’histoire naturelle ? Les envahissemens de la race blanche tendent aujourd’hui à effacer par toute la terre l’existence des autres races. Les traditions anciennes, qui nous représentent un premier homme blanc dont toutes les races sont sorties comme d’une souche unique, perpétuent sans doute une erreur ; mais ce n’est qu’une erreur de temps. L’unité de races, l’homme modèle, l’homme type, n’existe pas dans le passé ; il a sa raison d’être dans l’avenir. Adam n’est pas venu, il viendra.

Les races supérieures absorbent les races inférieures. Ce fait est sans exception. Tout nous porte à croire que la race noire a été primitivement la plus nombreuse ; elle est encore douée à cette heure d’une fécondité qui alimente partout l’esclavage ; son existence à la surface du globe ne s’est restreinte que sous les envahissemens des autres races qui sont venues s’établir au-dessus d’elle. En Amérique la race rouge forme l’assise inférieure, le substratum des peuples qui lui ont succédé sur sa terre natale. Déjà un grand nombre des indigènes du Nouveau-Monde ont disparu. Les autochthones, moins forts que les Incas, avaient été remplacés par eux ; la race caucasique, étant survenue, a éteint à son tour les Incas. Ce mouvement s’étend par toute la terre ; la race de Van-Diémen a cessé d’être, il n’en reste plus que trente ou quarante individus ; les Guanches ont été anéantis ; les Caraïbes, dont la race subsiste encore sur le continent, ont été détruits dans les îles de l’Amérique. Le voisinage des races robustes efface partout les races faibles ; celle des Indous, en rapport avec des groupes plus forts qu’elle, s’éteint de jour en jour. Il existe une histoire fossile du genre humain qui ne remonte pas au-delà des temps historiques : à mesure que l’on avance dans la terre, on retrouve les débris de races plus faibles et plus dégradées qui ont succombé. Ces couches superposées forment comme les âges successifs du genre humain. Quand ce mouvement d’absorption est naturel, il tourne à