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de plus amples découvertes. Qu’allons-nous faire dans les contrées lointaines et sauvages ? Chercher les traces de notre avènement sur le globe, conquérir notre histoire. Or, il faut nous hâter, car, tous les jours, les pages vivantes de cette histoire s’effacent ou disparaissent ; des races primitives s’éteignent, et avec elles s’en vont les derniers traits de la naissance de l’humanité.

Pour lever le voile sur le berceau de notre espèce, il convient avant tout d’en séparer les élémens. La race blanche a fait remonter à son origine le commencement du genre humain ; mais tout nous porte à croire qu’elle avait été précédée. Les autres races dont elle n’a pas voulu tenir compte historiquement, ou que dans son orgueil généalogique elle a imaginé de faire descendre d’elle par voie de dégénérescence, ont très probablement devancé son existence à la surface de la terre. On peut considérer le genre humain comme formant un règne à part dans la création ; les races sont, sous certains rapports, les unes vis-à-vis des autres, ce que sont les genres dans le règne animal. Or, comme toute existence a été en progrès sur le globe, il est naturel de penser que les races les plus inférieures sont aussi les plus anciennes. Ainsi que dans l’histoire des âges antédiluviens chaque transformation du globe coïncide avec un progrès dans le règne animal, de même les changemens postérieurs à la grande semaine de Moïse nous semblent avoir eu pour résultat l’apparition successive des divers groupes d’hommes sur les différens points de la planète. Nous pouvons déjà placer dans le voisinage de la ligne équatoriale le berceau de la race noire, dans l’Atlantide celui de la race rouge, dans le sud de l’Asie l’origine de la race jaune, dans le nord ou dans l’Asie centrale les premières traces de la race blanche. Le mouvement de destruction et de reproduction qui préside à toute la nature paraît s’être étendu jusque sur la genèse du genre humain : la race noire est le débris d’un monde antérieur ; elle a survécu misérablement au théâtre de sa force et de sa puissance. La race américaine nous semble également une ancienne race naufragée, dont Christophe Colomb retrouva les restes épars qui commençaient à se reformer sur le sol de l’Amérique. Le même coup de la main de Dieu qui brisait un continent et abîmait la race rouge, soulevait peut-être d’un autre côté les montagnes de l’Asie sur lesquelles la race blanche allait se manifester. Cette vue nouvelle fait éclater les étroites lisières chronologiques dans lesquelles nos historiens ont voulu envelopper l’existence du genre humain ; mais il faut se souvenir que les siècles sont comme les