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diminué de 33,500,000 francs, c’est-à-dire réduit de 134 millions à 100,500,000 francs ; mais il est entendu que, dans cette hypothèse, le capital reste le même, et, en effet, 100,500,000 francs en 3 trois quarts représentent exactement le même capital que 134 millions en 5 pour 100. Eh bien ! , l’état peut dire à ses créanciers : Au lieu de faire porter sur le montant de vos rentes une réduction de 33,500,000 francs, comme l’état du crédit m’y autorise, je la ferai plus forte, par exemple, de 40 millions, ce qui fera descendre la somme totale de 134 millions à 94. Par là j’excéderai la mesure de mon droit, je vous ferai éprouver une perte que rien ne vous oblige à subir ; mais pour vous en dédommager, j’élèverai votre capital, et ces 94 millions qui vous restent, je vous les livrerai en 3 pour 100. En effet, 94 millions en 3 pour 100 représentent un capital de 3,133,000,000. Il y aurait donc en ce cas, pour les rentiers, un sacrifice à faire de 6,500,000 fr. sur les intérêts annuels, mais aussi un bénéfice de 453 millions sur le capital de leur créance.

Dans cette dernière supposition, nous avons pris les chiffres presque au hasard, et uniquement pour nous servir d’exemple. Aussi n’entendons-nous pas les donner comme bases d’un calcul. On trouvera, sans doute, que nous supposons une réduction d’intérêts bien faible comparativement à l’énorme accroissement du capital. Cela peut être, et pourtant nous serions tentés de croire tout le contraire. On verra, du reste, que dans ce système, il serait tout-à-fait impossible d’établir entre les deux valeurs échangées une proportion exacte.

On voit bien maintenant que nous n’étions pas arrivés tout à l’heure à la dernière limite des réductions possibles. Avec le moyen que nous exposons, le champ des économies s’étend, et l’œuvre de la conversion prend des proportions encore plus grandes. Que faut-il penser de ce nouveau mode ? L’Angleterre l’a pratiqué, de bons esprits l’ont exalté en France ; on sait qu’il était particulièrement cher à M. J. Laffitte, dont l’autorité en ces matières est d’un grand poids, et que ce financier, aussi éclairé que respectable, avait à cœur de le faire prévaloir. Malgré l’exemple de l’Angleterre, qui n’a pas d’ailleurs procédé toujours de la même façon, malgré la juste autorité qui s’attache à l’opinion de M. J. Laffitte, nous avouons que ce système nous paraît essentiellement vicieux dans son principe. Voyons d’abord les avantages qu’il présente, nous en montrerons ensuite les inconvéniens.

Il est certain qu’en opérant la conversion en 3 pour 100, on se mettrait en mesure d’obtenir dès à présent des économies plus fortes. Admettons, si l’on veut, que la différence en mieux soit encore plus grande que nous ne l’avons supposé tout à l’heure ; ce serait là un