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à faire, ni embarras à exploiter. Les positions respectives sont nettes, les rapports très simples, et la transaction proposée est telle que le bon sens la dicte.

Le 5 pour 100 n’est donc conversible en 4 et demi qu’autant que ce dernier dépasse le pair ; mais l’est-il aussitôt que cette limite est franchie ? Oui, en principe rigoureux. On comprend bien toutefois qu’avant de s’engager dans une opération de cette importance, le gouvernement qui l’entreprend doit tenir compte des fluctuations qui peuvent survenir dans le cours de la rente durant la conversion, et par le fait de la conversion même. Il faut peu de chose, on le sait, pour occasionner une baisse de 1 ou 2 francs en quelques jours, et il n’en faudrait pas davantage en pareil cas pour faire échouer l’entreprise. Aussi une conversion engagée sous de telles conditions serait bien aventurée, d’autant mieux que le sentiment seul des dangers qu’elle présenterait suffirait peut-être pour entraîner immédiatement la chute des fonds.

Il est très difficile de déterminer d’une manière générale et absolue le terme précis où s’annonce la possibilité d’une conversion. Pour mieux dire, il n’y a point à cet égard de règles générales à établir, car il faut tenir compte de bien des circonstances diverses, tout apprécier et tout prévoir. Il faut considérer d’abord l’importance du capital à rembourser, en second lieu la situation plus ou moins calme, plus ou moins embarrassée, du marché public, enfin la position du gouvernement, ses moyens actuels et ses ressources. Toutefois, la part faite des circonstances, on peut dire, sans trop s’engager, que la conversion d’un titre de rentes est en général possible et facile lorsque le titre inférieur arrive à 103 ou 104 francs, et qu’il se maintient à ce taux d’une manière ferme et continue. Une fois ce terme arrivé, pourquoi attendrait-on davantage ? Le consentement des créanciers n’est pas douteux. D’autre part, il faudrait que l’opération même fût bien mal préparée, bien mal conduite, pour que sa seule influence déterminât une baisse de 3 ou 4 francs sur un cours bien établi. Nous admettrons sans doute que lorsque le fonds à rembourser ou à convertir est très considérable, comme notre 5 pour 100, il est bon de procéder avec sagesse, de n’entreprendre l’opération que lorsque l’état a des réserves, lorsque de toutes parts les fonds abondent, et de s’appuyer en outre sur le concours de plusieurs banquiers puissans, afin de faire face à toutes les éventualités possibles ; mais assurément, toutes ces précautions prises, il n’y a point de fonds, si considérable qu’on le suppose, qui ne soit réductible dans de semblables conditions.

Appliquant ces considérations générales à notre situation présente,