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entière. S’est-elle accrue depuis, ou bien a-t-elle diminué ? Voici quel est le nombre des navires entrés sur lest à la Havane après avoir débarqué leurs nègres sur la côte :

1834. Espagnol : 29 – Portugais : 3 - Français : 1 ; total 33
1835. Espagnol : 42 – Portugais : 8 ; total 50
1836. Espagnol : 29 – Portugais : 14 ; total 43
1837. Espagnol : 3 – Portugais : 48 ; total 51
1838. Espagnol : 4 – Portugais : 44 – Brésilien : 1 – Russe : 1 ; total 50
1839. Espagnol : 2 – Portugais : 29 – Américain : 6 ; total 37
1840. Espagnol : 7 – Américain : 6 – Portugais : 29 ; total 41

Dans les trois premières années, les négriers espagnols sont de beaucoup les plus nombreux. En 1837, la proportion se renverse tout à coup. C’est la conséquence du traité conclu en 1835 entre l’Angleterre et l’Espagne. D’après les dispositions arrêtées par ces deux puissances, le traité pouvait être mis à exécution sans nécessiter la coopération du cabinet de Madrid. Les négriers espagnols trouvèrent plus de sécurité à prendre le pavillon portugais. On voit, du reste, que le nombre des négriers n’a pas sensiblement varié pendant les sept années dont nous donnons les résultats, et en prenant 42 pour nombre moyen, selon que nous adopterons 300 ou 450 pour moyenne des nègres apportés par chaque bâtiment, nous aurons pour la Havane une importation annuelle de 12,600 ou de 18,900 noirs. Le chiffre des navires doit être exact, car, grace à la connivence des autorités de tout rang à Cuba, qui n’ont d’autre traitement que les primes que leur paient les négriers, ceux-ci n’avaient aucun intérêt à dissimuler leurs opérations : c’était dans le port qu’ils faisaient leurs préparatifs de départ et qu’ils venaient se réparer après le voyage.

C’était à la Havane que se faisait surtout la traite avant l’administration du général Valdez : le nouveau capitaine-général annonça, dès son arrivée, l’intention d’exécuter strictement les traités conclus avec l’Angleterre. C’est alors qu’un des principaux négriers alla le trouver et lui offrit 150,000 francs, sans préjudice de la prime habituelle par cargaison, s’il voulait suivre les erremens de ses prédécesseurs. Pour toute réponse, le général convoqua une assemblée des principaux commerçans engagés dans la traite ; il leur déclara qu’il leur donnait six mois pour terminer les entreprises commencées avant son arrivée,