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UNE CHASSE


AUX


NÈGRES-MARRONS.




Le soleil venait de disparaître derrière les mornes, et les nègres qui portaient nos bagages se débarrassèrent de leurs fardeaux comme des gens en disposition de faire halte. Nous étions parvenus à l’endroit où se joignent deux petits ruisseaux qui donnent naissance à la rivière des Marsouins, l’une des plus larges et des plus limpides de toutes celles dont les eaux capricieuses arrosent l’île Bourbon. Devant nous, vers l’ouest, par-delà le Coteau-Maigre, se dressait une muraille de montagnes volcaniques, au-dessus desquelles le Piton-de-fournaise lançait sa longue colonne de fumée. En nous tournant du côté de l’est, comme contraste à cette nature âpre et menaçante, nous voyions, entre deux cimes arrondies et boisées, la mer aussi calme qu’un beau lac. Un grand navire, faisant route vers l’île de France, reflétait dans ses voiles les dernières teintes du jour, et les vagues, sans cesse agitées le long de la côte, écumaient en se brisant sur les promontoires.

— Si vous voulez, messieurs, dit le docteur, nous n’irons pas plus loin aujourd’hui ; il est bon, avant de pénétrer dans les froides régions de l’île, de camper, cette nuit encore, en pays tempéré. Reste à savoir si nous trouverons par ici un gîte convenable.