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prendra sa revanche et redeviendra maîtresse des affaires. Il faut songer d’avance à ce jour-là.

Si de la première hypothèse on passe à la seconde, celle d’une guerre d’intérêts, il est bien plus difficile encore de prévoir et de prédire. Dans l’état actuel de l’horizon politique, il est pourtant deux points, l’un à l’occident, l’autre à l’orient, qui paraissent plus chargés de nuages que tous les autres : d’un côté l’Amérique du Nord, de l’autre l’empire ottoman. Or, selon que l’orage éclatera sur l’un ou l’autre de ces deux points, les situations et les chances seront fort différentes. On peut avoir plus ou moins de goût pour la race anglo-américaine, on ne peut nier ses grandes qualités ni se refuser à voir les hautes destinées qui l’attendent. À cette race évidemment est confiée la mission de féconder, de peupler, de fertiliser les vastes solitudes de l’Amérique du Nord. Dans cette œuvre immense, elle ne peut manquer de rencontrer l’Angleterre, ou, pour mieux dire, elle l’a déjà rencontrée. L’Angleterre, qui est maîtresse du Canada, qui a un pied sur l’Orégon, qui prétend dominer dans le golfe du Mexique, l’Angleterre cerne partout la grande république du Nouveau-Monde et cherche, autant qu’il est en elle, à retarder son développement. De là, sur la frontière du Canada, sur l’Orégon, au Texas, des difficultés et des conflits d’où la guerre peut sortir un jour. De là des paroles bien vives, bien agressives, qui déjà retentissent de l’un à l’autre cabinet, de l’une à l’autre tribune. Or, dans cette querelle entre Londres et Washington, l’intérêt de la France ne paraît pas douteux. Je ne dis rien des services rendus jadis par la France à l’Amérique : les états, surtout les états démocratiques, sont peu reconnaissans, et l’expérience a prouvé que l’Amérique ne fait pas exception ; mais, toute reconnaissance à part, il reste entre les États-Unis et la France des liens qui ne sauraient être si facilement rompus. Le premier de ces liens, c’est celui des institutions ; le second, celui des relations commerciales. Les États-Unis sont une république et la France n’en est pas une ; mais le principe libéral, le principe démocratique, est fortement enraciné dans les deux pays et anime les deux sociétés. Les États-Unis, on peut en être certain, n’entreraient jamais dans une ligne absolutiste contre la France. Quant aux relations commerciales, l’Amérique du Nord et la France ont besoin l’une de l’autre et jusqu’ici se font à peine concurrence. Il est d’ailleurs une autre considération bien puissante et qui seule suffirait à faire pencher la balance : l’Angleterre a la première marine du monde, la France la seconde. Entre les deux, il reste encore un large intervalle, un in-