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IV

Selon Levasseur, c’est à saint Médard, premier évêque de Noyon, qu’il faut attribuer la construction de l’église cathédrale. Avant lui, il n’avait existé dans la ville que de petits oratoires, tels qu’en bâtissaient les premiers chrétiens. Là seule église de la province, l’église épiscopale, était celle de Vermand, Augusta Vermanduorum, aujourd’hui Saint-Quentin. A la vérité, Levasseur ne veut pas admettre que Saint-Quentin ait jamais eu l’honneur d’être la capitale de la province et le siége de l’évêché : il consacre d’immenses dissertations à prouver que l’ancien.Vermand n’est autre que le village de Vermand situé aux environs de Noyon. Peut-être a-t-il raison, mais cela n’a pas la moindre importance. Ce qu’il suffit de constater, c’est que, vers l’an 470, la ville de Vermand fut saccagée et renversée de fond en comble par les Huns, et que saint Médard, évêque de Vermand, se retira, avec son troupeau, dans la ville ou plutôt dans le château de Noyon, castrum Noviomense ; que là, grace à de fortes murailles de construction romaine, il échappa aux fureurs des barbares, et qu’enfin, lorsque ce terrible orage fut passé, ne pouvant faire renaître de ses ruines la ville de Vermand, il se fixa définitivement à Noyon et en fit le siége de son évêché.

Cette tradition est confirmée par tant d’écrivains, que nous ne faisons aucune difficulté d’y ajouter foi. Il est donc probable que la première église bâtie à Noyon fut l’œuvre de saint Médard ; il y a même sur lieu de croire qu’elle occupait une partie de l’emplacement sur lequel s’élève l’église actuelle ; mais qu’il subsiste aujourd’hui un fragment quelconque, un seul pan de mur, une seule pierre de l’église de Saint-Médard c’est ce qu’il n’est pas même permis de supposer.

Levasseur n’en est pas moins convaincu qu’il a devant les yeux l’église du Ve siècle ; seulement il se demande si le saint prélat construisit l’édifice tout entier, ou s’il n’en acheva qu’une partie. Se conformant à l’opinion qui lui semble la plus générale, il n’attribue à saint Médard que le chœur seulement. Quant à la nef, elle lui parait être d’une autre main et d’un autre temps. Il suppose que sa construction tira en longueur, et que les premiers fondemens en furent jetés seulement vers le temps de Charlemagne, environ deux cents ans après la mort de saint Médard. Toutefois il n’est pas éloigné d’admettre que le saint évêque, pour accomplir son œuvre, avait bien pu construire quelque forme de nef ; mais il pense que cette partie du bâtiment,