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du mouvement local, le marché d’exportation, attirera à soi les forces vives éparses dans la contrée, et elles s’accroîtront en se combinant.

Probablement, quand cette révolution : sera accomplie, au lieu de deux petites villes, l’une de 1,900 ames, l’autre de 3,700, situées à trois lieues l’une de l’autre, on verra, à l’entrée de la vallée de la Canche, un port de 8 ou 10,000 ames. Le déplacement de la circulation fera tomber à Montreuil la plupart des établissemens formés sur la route de Paris à Calais, et qui retiennent cette ville sur le penchant d’une ruine depuis long-temps commencée. Ces effets douloureux de l’établissement des chemins de fer sont malheureusement inévitables. La population de Montreuil semble l’avoir compris : exclue par le relief du terrain de toute participation directe aux avantages de la nouvelle voie, elle n’a cherché à entraver ni à ralentir la marche fatale des choses et s’est retranchée dans une résignation silencieuse et digne ; mais ces sortes de revers ne frappent que les capitaux immobiliers : les hommes vont où les appellent les circonstances, et retrempés dans les torts de la fortune, l’énergie qu’ils y puisent les dote souvent d’un avenir préférable à leur passé.

Il reste à ajouter à cette esquisse de notre établissement maritime sur le Pas-de-Calais un trait malheureusement fort triste ; c’est l’état de la navigation internationale dans nos ports. En voici le mouvement par pavillon, entrées et sorties comprises, pendant l’année 1843 :


CALAIS BOULOGNE
Navires Tonneaux Navires Tonneaux
Français 938 44,562 78 4,260
Anglais 1,265 100,474 2,069 192,147
Autres 297 53,195 66 7,266
Totaux 2,500 198,231 2,213 203,773

Notre pavillon ne couvre à Calais que le huitième, à Boulogne que le cinquantième de la navigation, et encore la plus grande partie de notre tonnage à Calais tient-elle aux entrées et aux sorties quotidiennes des paquebots de l’état qui font le service des postes. Boulogne n’a pas un seul bateau à vapeur ; Calais n’en a qu’un de 26 chevaux. Le matériel naval de Douvres et de Folkstone ne l’emporte peut-être pas sur celui de Calais et de Boulogne ; mais en arrière des deux villes anglaises se trouvent la Tamise et Londres, le plus grand atelier de construction de machines et de navires qui soit dans l’univers. Satellites de ce grand corps, Folkstone et Douvres vivent de la vie qu’il leur