Page:Revue des Deux Mondes - 1844 - tome 8.djvu/733

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans un journal de l’époque, le Craftoman, et qui sont réunis dans ses œuvres sous le titre de Dissertation upon the parties ; telle fut la pensée qu’il développa surtout dans son pamphlet du Roi patriote.

Les idées de Bolingbroke sont aujourd’hui reprises par la jeune Angleterre. Quels sont les motifs qui ont, engagé le nouveau parti à recueillir ainsi l’héritage d’un autre siècle ? y a-t-il quelque analogie entre la situation actuelle et celle contre laquelle Bolingbroke soutint une lutte si infructueuse ? La jeune Angleterre l’assure. Dans une revue, et par une main qui me paraît bien être celle de M. Smythe lui-même, elle développait récemment à ce sujet ses raisons et ses vues. Le second Pitt semblait avoir porté un coup mortel à cette oligarchie du XVIIIe siècle en acceptant le pouvoir de la main de la royauté contre la majorité de la chambre des communes, et en le conservant par l’appui des classes moyennes, dont il servit avec une admirable intelligence les intérêts industriels et commerciaux. Cependant, suivant la jeune Angleterre, des hommes nouveaux dont la politique de Pitt a fait la fortune, des rangs supérieurs de ces classes moyennes qu’il a élevées, se serait formée, unie aux restes de l’ancienne oligarchie, une sorte d’aristocratie plébéienne. La jeune Angleterre reproche à ce patriciat bourgeois que le bill de réforme n’aurait pas suffisamment affaibli à son gré des tendances non moins mesquines, aussi peu nationales que celles de l’aristocratie dont Walpole et le duc de Newcastle furent les chefs au siècle dernier ; elle trouve que le gouvernement appartient encore à des combinaisons exclusives, à des coalitions d’intérêts privés ; elle voudrait que les affaires fussent conduites au point de vue des intérêts les plus généraux de la nation, et c’est pour cela qu’elle réhabilite l’ancien torysme de l’époque de Bolingbroke, le torysme de Pitt durant l’ère pacifique de son ministère, le torysme qui avait les sympathies de la majorité de la nation sous les deux premiers rois de la maison de Hanovre, quoiqu’il ne pût parvenir alors à arracher le pouvoir à l’aristocratie whig. A en croire la jeune Angleterre, l’ère des oligarchies vénitiennes et des aristocraties plébéiennes ne devrait plus avoir une longue durée dans le royaume uni, et les convictions et les sentimens du pays seraient préparés à se rallier bientôt autour d’une église populaire et d’une monarchie démocratique.

S’il ne faut voir dans ces assertions que des prévisions et des vœux, je n’y trouve rien à reprendre ; je crois qu’en effet la prédominance, des intérêts industriels et commerciaux, la gravité toujours croissante des misères de la classe laborieuse, et l’Irlande finissant par reconquérir