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de M. Pitt. C’est un malheur public que des commis deviennent ministres, que des hommes nés pour compiler des statistiques prennent le rôle d’hommes d’état, que les petits hommes usurpent l’héritage des grands. Que la médiocrité s’affuble des inspirations du génie, que Robespierre se fasse l’exécuteur des rêves de Rousseau, qu’un mortel se place dans le char du soleil, et le monde est sur le point d’être plongé dans les ténèbres, et la civilisation est retardée dans sa haute et radieuse carrière. » M. Smythe n’a pas bien saisi, au contraire, dans ses stances sur Armand Carrel, le caractère véritable du républicain de l’école américaine trempé par esprit militaire de l’empire. Armand Carrel n’était pas le paladin de philanthropie que M. Smythe a vu à travers ses idées anglaises de dévouement aux classes pauvres. Nous ne pouvons pas cependant nous dispenser de tenir compte à l’auteur des Historic Fancies des sentimens bienveillans pour la France dont cette poésie est l’expression. M. Smythe rend encore l’affectueuse sympathie que la France lui inspire dans les vers qu’il a écrits sur la mort du duc d’Orléans. M. Smythe se trouvait à Paris peu de temps avant cet effroyable malheur. Les élections générales venaient d’avoir lieu : elles s’étaient faites dans un sentiment d’antipathie à la politique du ministère, accusée de faiblesse à l’égard de l’Angleterre, et ce sentiment n’était pas loin de ressembler à de l’hostilité contre la nation anglaise. En apprenant la mort du duc d’Orléans, M. Smythe mêla un vœu à ses douloureux regrets : « Adieu, cher Paris ! Disait-il. Permets-moi, avant de m’éloigner, d’adresser une prière à ton malheur : au nom de ces belles pensées d’antique alliance que nous devrions accepter de maîtres plus sages ; au nom des espérances de Saint-John et du lien qui nous unit autrefois à Utrecht ; au nom de cette perte que nous pleurons ensemble ! et depuis cette heure ou d’Orléans a cessé de respirer ; au nom du triste spectacle devant lequel la France en deuil a ajouté une autre couleur aux couleurs de son drapeau ; au nom des larmes que notre Angleterre elle-même a versées sur cette jeune tombe, que la haine cesse désormais entre nous, que deux nations rivales sortent amies d’un malheur commun ! »

M. Smythe n’a donné qu’un petit nombre de pages à l’histoire de son pays. Les seules même qui puissent avoir une signification politique actuelle sont celles qu’il a appelées : Un Dîner de cabinet et Une Scène d’opposition au siècle dernier. Par ces deux dessins, qui se correspondent et font contraste, M. Smythe accuse légèrement l’antagonisme de sir Robert Walpole et de lord Bolingbroke. La fantaisie de