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de théologie, livres de médecine, tout a été, non détruit, mais dispersé dans le pays, chez les tolbas et chez les cadis. Plus que leurs sultans, les populations qui ne sont pas de race nomade ont conservé le souvenir de l’ancienne splendeur arabe ; c’est une tradition qui, à mesure qu’elle est allée s’effaçant, s’est convertie chez elles en une sorte d’instinct. Aujourd’hui encore, le Marocain, qui ne comprend pas la première lettre de ses manuscrits, refuse obstinément de s’en dessaisir ; l’étranger ne peut pas même obtenir qu’il lui veuille bien montrer les antiques parchemins dont ils sont recouverts.

Voilà comment s’est évanoui le dernier rayon de la civilisation arabe dans ce pays qui, après la conquête de Grenade, et après l’expulsion des Maurisques, en avait recueilli pourtant les débris les plus précieux. Il n’est pas de contrée musulmane qui, depuis lors, se soit tenue aussi obstinément à l’écart de toute influence européenne. Sans autorité, sans crédit et presque toujours sans lumières, les renégats s’estimaient trop heureux de conserver une vie misérable au prix de leur religion et de leur nationalité. Quelle influence auraient-ils pu exercer sur des populations qui les traitaient en parias ? De leurs voisins d’Espagne, les Maures repoussaient tout, même les médecins de Malaga et d’Alicante, qui venaient se proposer pour les guérir de la lèpre ou de la peste, et quant aux marchands de Gibraltar, ils se préoccupaient trop exclusivement des progrès de leur commerce, pour se dévouer à la propagation des idées qui régénèrent. Habitué à voir l’Europe plier devant lui, dans la personne de ses agens consulaires, et à remplir de son or le Beitul-mel de Méquinez, le sultan marocain, avant notre dernière campagne, n’avait compris qu’une seule fois la puissance de l’Occident : ce fut lorsque nos armes prenaient possession de l’Égypte. Au moment où Bonaparte rentrait en France, l’oncle du sultan actuel, Muley-Soliman, venait de promettre à Mourad-Bey de lui prêter assistance avec l’élite de son almagasen. Plus tard, quand Napoléon envoya ses troupes en Espagne, Soliman se souvenait encore des terreurs que lui avaient fait éprouver les victoires du jeune général de la république ; pour la première fois, dans l’esprit du Maure, les haines de race fléchirent ; Soliman fit offrir son alliance aux cortès de Cadix.

Abandonné complètement à lui-même, l’islamisme s’est perdu au Maroc par ses propres excès, par le seul vice de son principe : opérant une confusion absolue entre les deux ordres, l’ordre religieux et l’ordre politique, proclamant dans celui-ci le plus pur despotisme, dans celui-là le dogme étouffant de la fatalité, ce principe devait à la longue les bouleverser infailliblement l’un et l’autre ; il devait infailliblement relâcher tous les liens de la société civile, et jusqu’aux liens de famille, dépraver les mœurs, énerver les volontés, affaiblir les intelligences, séparer les races que Mahomet et ses lieutenans avaient réunies sous le même drapeau et dans le même symbole, briser enfin l’unité sociale que le génie du prophète avait eu tant de peine à fonder. Évidemment, un principe qui, à un tel point, se dégrade et abdique sa force est impuissant à se relever de lui-même. L’homme qui aujourd’hui