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supplices ; sept mille suspects se voyaient condamnés à l’exil ou réduits à la fuite ; on bannit jusqu’à des enfans de douze ans. Pendant quelques jours, la populace avait poursuivi les jacobins dans les maisons ; plusieurs d’entre eux s’étaient réfugiés dans les égouts, et on les y avait traqués. Pour exciter la rage de la populace, on accusait les libéraux d’avoir voulu pendre tous les lazzaroni ; ceux-ci firent d’innombrables visites domiciliaires, et massacrèrent tous ceux chez qui ils trouvaient un bout de corde. La peur seule ramena le roi Ferdinand à la clémence. On apprit que Bonaparte était revenu d’Égypte, et dès-lors Ferdinand, effrayé de sa propre cruauté, fit brûler les archives de tous les procès politiques.

C’est ainsi que se termina la première période de la révolution italienne : le mouvement rétrograde des gouvernemens effrayés par la révolution française, les victoires de Bonaparte, la réaction révolutionnaire des patriotes contre les gouvernemens, l’union du parti démocratique avec l’armée française qui occupait de cette manière toute la péninsule, la fondation des républiques, enfin l’avènement d’un parti national voulant accomplir la réforme sans l’appui de France, voilà le mouvement italien de 1791 à 1799. N’oublions pas que le libéralisme n’avait auparavant presque aucune représentation officielle : comment avait-il triomphé ? Par les conspirations ; les conspirations de Naples, de Venise, du Piémont, de Gênes, voilà quelle était sa première ressource nationale. Or, les patriotes qui avaient triomphé par surprise, une fois laissés à eux-mêmes, malgré l’action des lois révolutionnaires, se trouvaient à l’état de faction. L’enthousiasme républicain n’enfanta pas des armées, il ne tint pas devant les alliés, et les patriotes, hardis dans les conspirations, impuissans sur le terrain des affaires, condamnés à commettre toutes les fautes d’un parti faible qui veut rester modéré, furent entourés, enveloppés et emprisonnés comme des conspirateurs, et enfin livrés aux brigands qui appuyaient les sbires. Cette fois au moins ils furent sublimes dans le martyre. En France, c’était la démocratie, la convention qui régnait par la terreur ; en Italie, les républiques étaient inoffensives : c’est l’absolutisme qui s’imposa par les massacres. Ainsi, d’un côté des conspirateurs de l’autre des inquisiteurs et des bandits : nous voilà bien en Italie.


II – NAPOLEON ET LE ROYAUME D'ITALIE

Cette hideuse restauration de 1799 déconsidéra les gouvernemens italiens, et, à la seconde invasion, l’armée française ne rencontra sur