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Parmi les animaux, il y en à quelques-uns de fort intéressans, mais sans aucune étiquette ou explication quelconque. Cette collection occupe plusieurs étages d’une maison très élevée et remplit une foule de petites chambres, de cabinets, de corridors et de recoins, auxquels on arrive par plusieurs escaliers, tandis que, pour amuser le public, un homme joue du clavecin pendant toute la durée de l’exposition. »

Les collections d’art proprement dites ne sont guère mieux ordonnées. Pour bien des Américains, un tableau est un morceau de toile manufacturé d’une certaine façon. Un homme de goût faisait observer à un riche Américain qu’un de ces morceaux de toile attaché contre un mur salpétré menaçait de se détruire ; c’était un magnifique paysage de Caude Lorrain. — J’ai de l’argent, j’en achèterai un autre, répondit l’Américain. Il y a certainement chez ces gens-là quelque chose de la rudesse des Romains du temps du consul Mummius.

Dans le trajet de Boston à Providence, le voyageur admire la richesse et la vigueur de la végétation américaine, que la civilisation n’a fait en quelque sorte que modérer. De Providence, le prince se rendit à New-York, et de là, par New-Brunswick, Taunton et Bordentown, à Philadelphie, où le choléra venait d’éclater. Il traversa ensuite les districts allemands de Freiburg, visita la colonie des frères moraves de Bethléhem, où il fit la connaissance des directeurs, MM. Von Schweinitz, botaniste distingué, Anders et Seidel. Le prince, se trouvant au milieu de compatriotes aimables et instruits, prolongea quelque temps son séjour dans la colonie, dont il décrit les charmans paysages. De Bethléhem, il se rendit à Easton sur le Delaware ; de là, franchissant le Delaware-Gap, espèce de coupure par laquelle cette rivière s’échappe des monts Alleghanys, il s’engagea au milieu, de ces montagnes couvertes de forêts qui prennent à l’horizon les couleurs de l’azur le plus foncé, d’où vient leur nom de Montagnes Bleues. Le voyageur, toujours chassant, herborisant et ne faisant que de courtes haltes dans les loghouses des montagnards, franchit successivement les chaînes secondaires, et gravit le Pockono, la crête la plus élevée de ces montagnes, que couvrent d’épaisses forêts de pins et de chênes nains, où vivent encore en grand nombre les cerfs, les lynx, les renards gris ou rouges, et où le serpent à sonnettes se montre assez communément. Ces districts étaient autrefois occupés par la puissante nation des Indiens Delawares, les Loups et les Abenaquis des Français. Dans le principe, ils habitaient la Pensylvanie et la Nouvelle-Jersey ; ils se retirèrent ensuite dans l’Indiana, près de la Rivière-Blanche. Par suite du contact des blancs et de collisions perpétuelles avec leurs voisins, leur nombre était déjà fort diminué, en 1818. À cette époque, ils furent