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sur cent cinquante de largeur ; il a trois cents lieues de côtes, deux cents sur l’Océan, cent sur la Méditerranée, et une superficie de vingt-quatre mille trois cent soixante-dix-neuf lieues carrées environ. La population est répandue dans dix villes et dans une infinité de villages et de douairs nomades ; quatre de ces villes sont situées plus ou moins avant dans les terres, Méquinez, Maroc, Al-Kassar-Kebir et Fez, la seule qui aujourd’hui encore conserve quelques vestiges de la civilisation mauresque ; — trois, sur les côtes de la Méditerrané, Tanger qui n’a point de port, et dont la rade peu sûre, hérissée de rochers et de bancs de sable, contraint les vaisseaux de jeter l’ancre à une distance très considérable de la plage ; fort, près de Tanger, à l’ouest, le port de Larache, et, en vu de la ville espagnole de Ceuta, non loin des possessions françaises, le port de Tétuan ; — trois, sur l’Océan, Salé, Rabat et Mogador. C’est par Mogador que se fait la plus grande partie du commerce maritime avec la capitale de l’empire, qui s’élève à quelques lieues de distance, et avec les autres cités de l’intérieur.

Il est impossible, faute de données positives et de renseignemens statistiques, d’évaluer, même d’une façon approximative, la population du Maroc. Quelques voyageurs affirment que l’empire compte douze millions d’habitans ; mais encore que le Maroc soit plus vaste que l’Espagne, et une fois plus grand, ou peu s’en faut, que nos possessions d’Afrique ; c’est là un chiffre évidemment exagéré. Nous préférons nous en rapporter, quant à nous, à l’autorité des captifs et des proscrits qui, après avoir parcouru le pays dans toute son étendue, lui assignent une population inférieure à celle de l’Andalousie, supérieure à celle de l’Algérie et de l’Égypte, trois cent quarante- neuf âmes par lieue carrée. Or, si l’on excepte dix lieues environ de sables inhabités, la superficie de l’empire étant de vingt-quatre mille trois cent soixante et dix lieues carrées, la population, à ce compte, serait de huit millions cinq cent mille habitans, inégalement répartis dans les quatre principales divisions du pays, trois millions deux cent mille dans le royaume de Maroc, trois millions six cent mille dans celui de Fez, sept cent mille dans le Tafilet et le Segelmesa, un million dans le Sus et dans les autres districts du midi. Au reste, on peut dire que depuis le XVIe siècle la population du Maroc a diminue d’un tiers, sinon de moitié. Grace aux rivières pourtant, au voisinage de la mer, aux vents qui soufflent des montagnes, le climat du pays est un des plus sains de la terre, et il est des districts entiers, comme Tétuan et la contrée dont cette ville est la capitale, où les saisons se balancent à peu près comme dans nos provinces méridionales. Mais parmi ces tribus fatalistes, les dernières pestes ont exercé d’incroyables ravages ; ce ne sont encore partout que ruines et décombres, magasins fermés, maisons sans habitans. La race arabe est depuis long-temps déchue de son aptitude, célèbre autrefois, aux sciences médicales ; les maladies ne sont pas combattues au Maroc que par des drogues toujours nuisibles ou par de simples sortilèges. Les plaies, et en général tout ce qui ressortit à la chirurgie est abandonné à la seule nature ; quand une balle est engagée dans les chairs, on essaie de l’extraire en agrandissant