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au consul espagnol que les Autrichiens ont eu recours. En même temps qu’elle retira son consul, l’Autriche cessa de payer le tribut. Abderrahman en ressentit un si vif dépit, qu’il fit essuyer les dernières avanies à tous les sujets autrichiens qui avaient affaire dans son empire. On sait qu’en 1829 une escadre, commandée par l’amiral Bandiera, fut chargée d’en tirer vengeance ; mais, après avoir lancé quelques boulets contre les villes de la côte, l’Autriche accepta la médiation du Danemark, et, en février 1830, un traité nouveau, abrogeant de tout point les anciens, fut conclu entre l’empereur et le Maroc. On ne connaît pas encore en quoi ce traité consiste ; nous pouvons affirmer néanmoins que l’Autriche n’a rien stipulé pour son commerce ; elle s’est bornée à déclarer qu’à l’avenir elle entendait ne plus payer le tribut.

Les relations de la Hollande avec le Maroc ont commencé en même temps que celles de l’Autriche. Ce fut aussi le sultan Abu-Fers qui, en 1604, envoya à La Haye le Juif espagnol Pachero pour s’entendre avec les états-généraux. Pacheco mourut en Hollande ; les gazettes de l’époque rapportent que les honneurs funèbres lui furent décernés, ni plus ni moins qu’à un véritable ambassadeur. En 1684, un autre Juif conclut au nom du sultan, avec les Provinces-Unies, un traité qui depuis a été renouvelé à trois reprises différentes, en 1732, en 1755, et en 1778. Aux termes de ce traité, la Hollande était obligée de payer tous les ans 15,000 duros au sultan ; mais en 1815, au moment où les Pays-Bas furent érigés en royaume, le roi Guillaume envoya tout exprès un de ses généraux au sultan Muley-Soliman pour lui signifier qu’il cessait d’être son tributaire. C’est précisément cette détermination du roi Guillaume qui, plus tard, décida l’Autriche à ne plus acquitter la subvention de 10,000 sequins qu’elle s’était imposée, en 1815, au nom de Venise.

La France est venue tard au Maroc, c’est en 1693 seulement, sous Louis XIV, qu’elle y a envoyé son premier négociateur, qui, presque aussitôt après son arrivée, rentra en Europe. La France de l’ancien régime n’a conclu son traité qu’en 1767. Ce traité ne stipulait ni tribut, ni présent ; c’est assez dire que nos affaires au Maroc étaient à peu prés nulles. C’est pourtant ce traité de 1767, quelquefois renouvelé avant les différends survenus au sujet de nos possessions d’Afrique, mais sans que de part ni d’autre on y attachât une grande importance, que les conventions récentes remettent en pleine vigueur. M. Guizot pense-t-il que notre commerce lui en doive témoigner une bien vive gratitude ?

Le Danemark et la Suède ont traité presque à la même époque avec le Maroc, l’un en 1753, l’autre dix ans après environ. Le Danemark se soumit a un tribut de vingt-cinq mille duros qu’il a payé jusque dans ces derniers temps ; à cette condition, le Danemark obtint un privilège exclusif pour une compagnie qui s’établit sur les côtes de l’Océan, de Salé à Saffi. Dans les quatorze premières années de sa fondation, la compagnie danoise était parvenue à un assez haut degré de prospérité ; ce sont les entreprises hasardeuses,