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des temps et des hommes doit amener ? Nous concevons un ministre président du bureau de commerce, un homme politique changeant avec les partis, s’il le faut, mais s’appuyant, dans de si grands intérêts, sur l’avis discuté devant lui par les membres d’un bureau choisi dans des hommes de capacité et d’expérience, n’éprouvant guère d’autres mutations que celle qu’entraîne le cours de la vie humaine et enfantant des résolutions empreintes d’un esprit de force et de durée. Un semblable bureau, auquel viendraient prendre place, à titre égal, des directeurs pris dans les autres branches d’administration dont le concours est nécessaire, pourrait délibérer en présence même de tous ceux des ministres qui y seraient intéressés. Tous sortiraient de cette réunion éclairés pour le conseil qui lui succéderait. Le bureau de commerce rendrait superflues ces commissions temporaires dont un si petit nombre termine ses travaux par une délibération utile et praticable ; il rendrait encore inutile le conseil supérieur, qui renferme des noms illustres, mais si peu d’hommes éclairés par la pratique des affaires du temps présent. L’avenir du peu de colonies qui nous restent, la création d’établissemens nouveaux, nos rapports commerciaux avec tous les peuples, la dignité du nom français, les intérêts de notre marine, la direction de notre industrie, seraient des sujets perpétuels de méditation ; la confiance du commerce s’en accroîtrait, et peut-être verrait-on cesser la répugnance des maisons françaises à fonder des comptoirs dans les pays lointains.

La paix entre les grandes puissances est rétablie depuis trente ans, et malgré les nuages que les évènemens peuvent soulever, elle est trop dans les intérêts de tous les peuples et de tous les gouvernemens pour que les passions les plus vives puissent la troubler. La guerre mettrait le commerce du monde aux mains des nations qui garderaient la neutralité, et personne ne veut grandir ses rivaux en fortune et en richesse. Le monde est donc ouvert à tous ceux qui voudront et sauront l’exploiter : non pas qu’il n’y ait bien des pays déjà soustraits à l’activité générale, monopolisés par le protectorat ou la colonisation ; mais ce qu’il en reste offre encore d’immenses ressources, et le commerce français ne peut se décourager. Le devoir du gouvernement est de l’accompagner dans ses travaux, de placer, partout où nos nationaux peuvent être appelés, des agens consulaires en nombre suffisant pour que la protection ne fasse jamais défaut. Non-seulement de semblables emplois doivent être le partage d’hommes dignes, éclairés et fermes, capables de faire respecter le pavillon qui flottera sur leur demeure ; mais, en exigeant d’eux de grandes qualités et des connaissances