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Débarquant avec son portefeuille sous le bras, il fut arrêté par un officier des douanes qui voulut le lui arracher de force. M. de Langsdorff résista ; ses observations ne furent pas écoutées, et sans l’intervention de quelques Brésiliens qui expliquèrent au douanier la position de M. de Langsdorff, les papiers. de notre ministre auraient été soumis à l’examen d’un agent de douanes brésiliennes.

Dès mon arrivée à Rio-Janeiro, je pus reconnaître combien un voyage dans l’intérieur des terres présenterait d’obstacles. Désirant parcourir la province de Minas-Geraës, la plus importante du Brésil, je dus chercher à obtenir des renseignemens précis. Les ministres et les hommes qu’on me citait comme distingués par leur esprit et leur position n’avaient aucune connaissance des ressources de cette province. C’est à peine si l’on peut obtenir des Brésiliens quelques notions, souvent même incomplètes, sur la localité qu’ils habitent. Vous ne rencontrerez jamais un homme d’état qui puisse émettre sur la position intérieure des provinces une opinion appuyée par des faits On est réduit à recourir aux ouvrages des différens voyageurs qui ont exploré le Brésil.

Rio-Janeiro, capitale de l’empire et centre du gouvernement, sert de résidence à tous les hommes qui veulent chercher fortune dans les affaires publiques. Là se rencontrent tous les personnages qui ont joué un rôle dans les révolutions de provinces et qui viennent ou demande le prix de leur dévouement ou imposer des conditions aux ministres qui les redoutent. Sous le rapport des distractions mondaines, la capitale du Brésil n’offre que peu de ressources à l’Européen. La population repousse le contact des étrangers ; quelques familles qui ont vécu en Europe cherchent seules à attirer les voyageurs et les accueillent avec bienveillance. La cour, loin de donner une impulsion à la société, est toujours triste et sérieuse ; l’empereur fuit le monde, et les fêtes à la cour sont trop rares pour qu’on puisse en parler. L’étiquette du reste, est assez bizarre. Il a été reçu pendant long-temps que les sœurs de l’empereur ne pouvaient danser qu’avec des femmes. Ce fut M. le prince de Joinville qui le premier fit enfreindre cette rigoureuse prescription. J’espère que la présence d’une jeune impératrice habituée aux plaisirs d’une cour plus gaie aura amené un heureux changement dans la vie monotone des courtisans qui entourent l’empereur.

Pour un étranger qui ne réside pas, le séjour de Rio est donc des plus tristes. Les femmes étant à peine vêtues dans leur intérieur, toute visite est une gêne pour elles. D’ailleurs, la jalousie des hommes vous