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Est-ce la politique commerciale de sir Robert Peel qu’il réprouve, lorsqu’il est lui-même contraire au régime restrictif ? En matière religieuse, il se déclare contre cette intolérance qui a tenu pendant si long-temps et qui tient encore sur plusieurs points les catholiques et les dissidens dans un état d’infériorité politique. Il demande, dans l’intérêt de l’église, dit-il, la rupture du Church and State, la séparation de l’église et de l’état. Jusqu’à présent, cette séparation me semble avoir été réclamée par les dissidens et par les catholiques bien plus que par les tories ; il me semble que c’est en défendant avec une grande élévation de pensée la thèse contraire que M. Gladstone a acquis, par son livre the Church in its relations with the State, cette position dans son parti qui l’a conduit de si bonne heure aux premiers emplois. Des paroles comme les suivantes peuvent être dictées, je veux le croire, par un intérêt sincère pour l’église d’Angleterre : « Les seules conséquences de l’union actuelle de l’église et de l’état sont, dit M. d’Israeli, du côté de l’état une intervention continuelle dans le gouvernement de l’église, du côté de celle-ci la désertion des seuls principes sur lesquels peut être établi le gouvernement de l’église, et par l’influence desquels l’église d’Angleterre pourrait redevenir universelle. Tant que l’église est gouvernée par ses principes véritables, ses biens sont les biens du peuple. L’église est le milieu par lequel les classes méprisées et dégradées ressaisissent avec l’égalité naturelle les droits et la puissance de l’intelligence ; c’est elle qui, aux heures les plus sombres de la tyrannie normande, a fait un primat d’Angleterre du fils d’un colporteur ; c’est elle qui a placé Nicolas Breakspear, un paysan du Hertfordshire, sur le trône des Césars. » Sir Robert Inglis accepterait-il ce langage, qui respire si évidemment un hommage et un regret adressés au catholicisme romain ? Il est permis d’en douter. Il est plus douteux encore que les membres actuels de l’église établie voient un défenseur dans M. d’Israeli, lorsqu’il ajoute avec vérité, j’incline à le penser, mais avec la vérité qu’ils sont habitués à trouver dans la bouche de leurs plus décidés adversaires : « L’église ferait maintenant d’aussi grandes, choses, si elle brisait l’union dégradante et tyrannique qui l’enchaîne. Vous auriez encore des fils de paysans pour évêques d’Angleterre, au lieu d’hommes qui n’ont d’autre titre à cette dignité sacrée que d’être les rejetons besogneux d’une aristocratie factice ; hommes d’une ignorance grossière, de mœurs désordonnées, d’insatiable avarice, qui ont déshonoré le nom épiscopal et profané l’autel. De nos jours, un prêtre n’est pas regardé comme un digne successeur de ceux qui ont écrit les Évangiles, s’il n’a pas édité une pièce grecque, et le disciple de saint Paul