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désastreuse. Il est donc urgent d’ouvrir un nouveau marché à ce commerce ; il faut que le Texas soit colonisé par des propriétaires des esclaves, il faut que l’esclavage n’y soit jamais aboli. Le prédécesseur de M. Calhoun, M. Upshur, ne craignit pas de dire en plein sénat que, quand la Louisiane interdit l’introduction de nouveaux esclaves dans son territoire, il y eut, le jour même où la nouvelle arriva, baisse de 25 pour 100 dans le prix des esclaves en Virginie, et que ses calculs le portaient : à croire que l’annexation du Texas produirait au contraire une hausse de 50 pour 100 dans tout le sud. Il appelait cela un argument en faveur de l’annexation ; mais l’argument que les gens du sud mettent le plus souvent et le plus volontiers en avant parce que leurs adversaires ne peuvent lui refuser une apparence de raison, c’est la nécessité de maintenir l’équilibre entre les deux parties de l’Union. « « Faut-il donc, disait récemment au congrès M. Wise de la Virginie, faut-il donc que les états à esclaves soient arrêtés net sur les rives de la Sabine et voient un immense accroissement de territoire et de population dévolu aux états du nord ? Maintenant les deux partis ont dans le sénat 26 voix contre 26, mais demain l’équilibre peut être rompu. Si l’Iowa est ajouté d’un côté, la Floride le sera de l’autre ; là s’arrêteront les compensations. Admettez un nouvel état au nord, et voilà l’équilibre rompu, non pour un jour, mais à jamais, et le sud s’arrêterait à la Sabine, tandis que le nord pourrait se répandre en liberté jusqu’au-delà des montagnes Rocheuses, et emporterait en sa faveur le plateau de la balance ! »

En effet, le territoire de Wisconsin grandit rapidement et pourra bientôt réclamer son admission dans l’Union ; les gens du sud affectent de ne demander l’annexation du Texas que comme une compensation de l’admission du Wisconsin. Pourtant le territoire de Wisconsin est limité, le Texas est immense ; le congrès texien, en 1836, s’est adjugé de sa propre autorité plusieurs des provinces du Mexique, et, entre les mains des hommes du sud, ces incroyables prétentions deviendront des droits incontestables. Il est donc évident que le Texas. sera divisé en plusieurs états, et cela dans un avenir très prochain, parce que la population s’y accroît avec une extrême rapidité, et les nouveaux états enfantés par le sud lui donneront dans le congrès une réelle supériorité. Si le Texas reste indépendant, c’en est fait à jamais de la suprématie du sud ; l’annexation, au contraire, c’est l’empire et pour long-temps.

Avec de semblables motifs pour désirer l’annexation, on peut être certain que les hommes du sud l’obtiendront, car ils ne reculeront