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attache une importance bien plus grande encore à l’aveu fait par lord Aberdeen, du désir qu’entretient la Grande-Bretagne de voir l’esclavage aboli au Texas, et des efforts de sa diplomatie pour y parvenir, en faisant de cette abolition une des conditions auxquelles son indépendance serait reconnue par le Mexique…. Il a acquis la conviction bien arrêtée que, dans le cas où le Texas ne saurait empêcher la réalisation des vœux de la Grande-Bretagne, il en résulterait du péril pour le salut et la prospérité de l’Union. Cette conviction acquise, c’était un devoir impérieux pour le gouvernement fédéral, le représentant et le commun protecteur des états de l’Union, d’adopter en vue de la défense générale les mesures les plus efficaces pour empêcher un pareil résultat. »

Après avoir énuméré les dangers que courrait l’Union si le Texas était soumis à l’influence de l’Angleterre, et établi le droit du Texas et des États-Unis à signer le traité d’annexation, M. Calhoun aborde avec la même franchise la question de l’esclavage, et il essaie de prouver, par des chiffres d’une exactitude fort contestée, que la liberté est plus fatale aux noirs que la servitude, et qu’elle a pour conséquence leur dégradation physique et morale ; puis il conclut sans hésiter de la façon suivante : « L’expérience a prouvé que les rapports existant actuellement dans les états à esclaves entre le blanc et le noir, et d’après lesquels l’un est soumis à l’autre, s’accordent bien avec la paix et le salut de tous deux, et avec un grand développement de bonheur pour la race inférieure ; et cette même expérience a prouvé que les relations que la Grande-Bretagne cherche à substituer aux anciens rapports dans ce pays et, ailleurs auraient pour résultat, sinon de faire disparaître la race inférieure par les complots auxquels elles donneraient naissance, au moins de la réduire aux dernières extrémités de la corruption et du malheur. En envisageant ainsi la question, on peut assurer que ce qu’on appelle l’esclavage est en réalité une institution politique essentielle à la paix, à la sûreté et à la prospérité des états de l’Union dans lesquels elle existe. »

Il est impossible d’être plus clair et plus net, et le parti démocratique dans ses plus mauvais jours, alors qu’il massacrait l’infortuné Lovejoy et qu’il ensanglantait les rues de New-York et de Boston, est rarement allé aussi loin que M. Calhoun : les organes les plus exaltés de ce parti faisaient appel aux passions populaires, mais je ne sais si l’on trouverait dans leurs colonnes une apologie aussi audacieuse et aussi calme de l’esclavage. Ce n’est même pas une apologie, c’est la glorification d’un crime anti-social. Malheureusement ces principes