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DE L’ÉTAT DES FORCES NAVALES DE LA FRANCE.

qui n’a cependant que des qualités fort ordinaires, le Cuvier fut obligé de relâcher, tandis que l’autre continuait tranquillement sa route.

Viennent ensuite le Gassendi et le Lavoisier, de 220, mauvais navires, mauvaises machines ; toujours en coûteuses réparations, ils sont loin d’avoir rendu des services équivalens, malgré les efforts des officiers qui les ont commandés.

Puis le Caméléon, qui ne peut atteindre que 7 nœuds à toute vapeur ; enfin le Platon, le Véloce, l’Archimède, de 220, comme le précédent. Ces trois navires sont les meilleurs de la marine, quoique trop lourds, eu égard à la force de leur moteur. Ils ont de bonnes qualités, et leur marche, sans être supérieure, est au moins satisfaisante. Partout où ils paraîtront dans les stations étrangères, nous n’aurons pas à subir d’humiliantes comparaisons ; nous n’aurons pas, comme récemment dans la station du Levant, le spectacle de deux navires, l’un anglais, l’autre français, tous deux sortis du Pirée pour porter secours à une de nos corvettes et l’arracher de la côte où elle s’était échouée, rentrant tous deux au même port, aux yeux de deux escadres réunies, l’un, l’anglais, traînant à la remorque notre corvette, et luttant de vitesse malgré cela avec le vapeur français, qui terminait ainsi le rôle d’impuissance qu’il avait commencé sur le lieu de l’échouage.

Les 6 vapeurs de 220 sont, comme les 450, réservés pour des missions politiques ou autres. Un d’eux, l’Archimède, vient de quitter Brest avec destination pour les mers de Chine, où il fera partie de la division navale qui s’y trouve réunie. Les 5 autres sont presque constamment requis pour les besoins de la politique, ou pour coopérer aux mutations qui s’opèrent en automne dans les troupes de l’Algérie.

Cette espèce de navires nous paraît, dans les conditions actuelles, particulièrement appropriée aux services de guerre que nous attendons d’une marine à vapeur. Une double expérience a lieu en ce moment ; deux systèmes d’armement sont essayés, l’un à bord du Caméléon, l’autre à bord du Pluton. Espérons que l’étude comparative de ces systèmes, qui tous deux sont un hommage rendu au principe que nous avons énoncé, servira à constater la supériorité de l’un ou de l’autre, ou fera apparaître une combinaison meilleure : quelle qu’elle soit, il est à désirer qu’on se hâte d’en faire l’application générale à bord de la flotte, car notre système actuel d’armement, ou plutôt l’absence de tout système, est une cause sérieuse d’infériorité militaire qu’il faut déplorer.

Nous arrivons maintenant à la classe des 160, classe nombreuse, et qui constitue la majeure partie de la flotte à vapeur.

Lorsque le Sphinx parut, en 1829, la marine militaire en était à ses débuts dans la navigation à la vapeur ; elle ne possédait qu’un petit nombre de navires, essais malheureux, propres tout au plus à être utilisés comme remorqueurs sur les rades. À cette époque, le Sphinx était un progrès, et un progrès très réel, qui laissait bien loin en arrière tout ce qu’on avait pro-