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devait nous parler des monopoles ecclésiastiques ; après avoir attaqué les codes modernes, il devait nous parler des lois des états romains ; après avoir condamné les majorités révolutionnaires, il devait examiner avec la même impartialité les minorités des prélats. Il se déchaîne contre les violences révolutionnaires : il pouvait signaler aussi les violences des contre-révolutions catholiques ; il condamne la jurisprudence moderne, qui, en jugeant l’acte et non la pensée, se sépare de la morale : il devait critiquer par les faits avec la même rigueur cette jurisprudence antique de l’église qui juge de l’acte par l’intention, et se ménage ainsi le pouvoir d’agir arbitrairement et de confondre l’absolution avec la réhabilitation politique. Assurément, l’état présente mille imperfections ; il donne prise à la critique, il ne se suffit pas à lui-même, il ne suffit pas à l’humanité. Sans doute les églises nationales, sans présenter les inconvéniens du gouvernement romain, cachent souvent la tyrannie sous l’apparence de la liberté. Cependant il était du devoir de M. Rosmini, il est du devoir de tout catholique de bonne foi, de ne pas aborder la critique des états modernes sans discuter aussi l’organisation politique du saint-siége. Cette organisation est un fait monstrueux, qui condamne tous ceux qui l’acceptent, soit ouvertement, soit en silence ; c’est le fait qui a provoqué la révolte protestante, c’est le fait qui a donné à l’église romaine le caractère d’une conspiration catholique contre la constitution de tous les états. Les penseurs les plus élevés, Kant le premier, proclament la nécessité d’une église universelle, placée au-dessus de tous les états ; mais le gouvernement du saint-siége, si on ne réforme la domination temporelle, l’inquisition, l’index, les volontaires et la prélature, ne sera qu’une protestation contre la tendance universelle de tous les peuples.


Ferrari.