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DE LA PHILOSOPHIE CATHOLIQUE EN ITALE.

netti révoqua immédiatement cette concession par le motu proprio du 15 juillet. Pourquoi cette rétractation ? Parce qu’il était impossible à la cour de Rome de tenir sa promesse : cette simple concession administrative et nullement politique aurait organisé dans toute sa force l’état moderne, le mouvement se serait propagé peu à peu depuis la commune jusqu’au conseil d’état, il aurait laissé la prélature sans finances ; dès-lors la prélature, les cardinaux et le pape se seraient un jour ou l’autre trouvés à la merci de l’état, stipendiés par l’état comme de simples fonctionnaires publics. Le motu proprio souleva des troubles, l’armée autrichienne intervint une seconde fois, et à Bologne elle fut accueillie aux applaudissemens de la population. Malgré le memorandum, malgré l’urgence d’une réforme, malgré l’innocence de ce mouvement où l’on n’avait pas répandu une goutte de sang italien, le gouvernement fut réintégré, et le cardinal Albani signa un nombre immense de condamnations politiques. La tyrannie des prélats se fit sentir au point qu’il y a quelques années, on découvrit à Bologne une conspiration Ferdinandea en faveur de l’Autriche. Beaucoup d’Italiens dans les légations, sans aimer l’Autriche, la préféreraient au saint-siége, et il faut reconnaître que l’administration impériale serait un bienfait, comparée au gouvernement des prêtres et à la police des volontaires.

Le nouveau parti guelfe lutte dans la Romagne contre le développement de l’état, à Rome contre la crise financière qui le mine ; dans la Haute-Italie, il défend la cause de l’absolutisme contre les libéraux et contre l’Autriche. En apparence il attaque la domination de l’Autriche, en réalité il ne pourrait pas subsister sans la présence de

    entre deux fléaux, les brigands et les volontaires. Quant aux libéraux, tout est permis contre eux, ils ont tout à craindre, jusqu’à l’assassinat. En 1835, M. Farini, notaire très respecté, était tué à l’âge de soixante ans, sans avoir aucun ennemi dans le pays, évidemment par des agens de police. La famille, la commune, les autorités de l’endroit, demandaient justice : un cardinal répondait ex-officio de Rome qu’il était à remercier Dieu que l’on fût délivré de l’un des libéraux les plus dangereux. L’hostilité du gouvernement contre la population est telle qu’on a fait surveiller des colléges d’enfans par des postes militaires ; l’obscurantisme est arrivé au point qu’on a supprimé des écoles de calligraphie, afin (disait l’édit) que les jeunes gens n’apprissent pas à falsifier les écritures : on a même supprimé les salles d’asiles pour les enfans, comme si elles favorisaient la révolution. Il est vivement à regretter que nos journaux religieux ne donnent pas le compte rendu des arrêts de la censure de Rome : on y verrait des poètes condamnés à l’amende pour avoir appelé Agamemnon le roi des rois, d’autres exilés pour avoir mis en scène la Vestale sans respect pour les prêtres du paganisme ; les marionnettes elles-mêmes sont persécutées, tout est suspect pour ces prélats qui voient tout conspirer contre leur existence.