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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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30 avril 1844.


Le ministère se flattait-il de couper court à l’affaire de Taïti et de n’avoir pas à reprendre les explications échangées dans les derniers jours de février ? Nous l’ignorons ; mais ce qu’on peut affirmer, c’est qu’une telle espérance eût été bien peu fondée. Un grand pays n’éprouve pas impunément une émotion aussi universelle et aussi profonde. Que le désaveu de l’amiral Dupetit-Thouars ait, en effet, blessé la France dans sa fibre la plus sensible, qu’il ait mis le dévouement de notre marine à une rude épreuve et compromis peut-être pour l’avenir nos relations amicales avec l’Angleterre, c’est ce qui ne saurait faire l’objet d’un doute pour quiconque n’est pas étranger à la vie nationale de ce pays.

Or, c’est l’honneur et la mission du gouvernement représentatif de donner un cours régulier à ces agitations, et d’appeler les passions du dehors à se produire au sein du parlement sous le contrôle d’un débat contradictoire. Aussi ne saurions-nous comprendre l’étonnement affecté par quelques organes de la presse, en voyant l’opposition reprendre dans les deux chambres le débat récemment fermé sur Taïti. Ce n’est jamais que par une idée simple qu’un parti gagne du terrain dans la conscience publique, il est rarement utile en politique d’épuiser plusieurs idées à la fois, et c’est en concentrant ses efforts sur une question principale qu’une opposition bien conduite peut se montrer formidable.

Telle est la méthode usitée en Angleterre, telle est celle qu’ont appliquée chez nous les membres les plus éminens de l’administration du 29 octobre