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rapidement sur Hyderabad ; chaque nouvelle apportée des progrès de sa marche augmentait l’exaspération des Beloutchis. Les derniers momens de cette crise répandent un douloureux intérêt sur les infortunés émirs placés ainsi entre les violences des étrangers et l’indignation impatiente de leur peuple. Les dépêches du major Outram à sir Charles Napier peignent vivement leur anxiété. Le 12 février, le major écrivait au général : « Ces malheureux sont dans les plus grandes alarmes, en voyant vos troupes s’avancer vers Hyderabad ; ils espéraient que leur acceptation du traité vous ferait arrêter. Je crains, si vous allez au-delà d’Hallaur, que, poussés par la terreur, ils ne rassemblent leur populace pour se défendre eux et leurs familles, dans l’idée que nous sommes résolus à les détruire malgré leur soumission. » Deux jours après, il écrivait encore en conjurant le général de ne plus avancer : « Il me semble que les émirs sont maintenant exécrés par leurs soldats, qui leur reprochent ce qu’ils appellent une lâche soumission à un brigandage. Pour la première fois depuis que je réside dans le Scinde, j’ai été reçu hier par la multitude avec des manifestations significatives de haine contre les Anglais. Si nous n’avions été gardés par une nombreuse escorte conduite par quelques-uns des chefs beloutchis les plus influens, la populace en serait venue à des violences contre nous. Il est évident que les émirs ont fait tout leur possible pour nous protéger… Ils m’ont envoyé dire que les Beloutchis deviennent ingouvernables et refusent de leur obéir en aucune manière ; ils m’ont engagé par amitié à me retirer le plus tôt possible. » Malgré les dangers auxquels il s’exposait en prolongeant son séjour à Hyderabad, le major Outram différait toujours de partir, dans la crainte de fermer la porte à tout accommodement. Mais sir Charles Napier refusait de son côté toute mesure de conciliation ; à la demande de la réintégration de Roustum dans la dignité de reïs, il avait répondu par ces mots : « Il ne peut plus être question de la restitution du turban ; je n’y consentirais que sur un ordre exprès du gouverneur-général. » Enfin, le 15 février, jetant irrévocablement le fourreau de son épée, il écrivait au major Outram : « Je suis en pleine marche sur Hyderabad, et je ne ferai point de paix avec les émirs. Je les attaquerai dès que je rencontrerai leurs troupes. Qu’ils se dispensent de m’adresser des propositions ; il n’est plus temps : je ne recevrai pas leurs messagers. » Et, en effet, après deux actions éclatantes, les batailles de Meani et d’Hyderabad, où, une fois avec 2,500 hommes, une autre fois avec 5,000, il défit plus de 20,000 Beloutchis qui se battirent en désespérés, sir Charles Napier, vers la fin