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DE LA CRISE POLITIQUE EN ESPAGNE.

les conseils de M. Guizot n’inspirent point à M. Gonzalès-Bravo le respect des lois et des garanties constitutionnelles ? Pourquoi envoyer à Madrid un de nos plus habiles diplomates, s’il ne doit être que le spectateur impassible des coups d’état des modérés ?

Gonzalès-Bravo en est encore à son début politique : c’est à lui surtout qu’il importe d’abandonner au plus tôt les voies de violence où son cabinet vient d’entrer. Le président actuel du conseil n’est plus l’ancien rédacteur du Guirigay ; en assumant sur lui toute la responsabilité du pouvoir, à l’heure où les plus vieux champions de la monarchie avaient, pour ainsi dire, déserté son drapeau, M. Bravo a rendu un incontestable service à la cause de l’ordre et à celle de la reine ; il y aurait ingratitude à lui faire aujourd’hui un grief sérieux de ses précédens. Le bruit s’est répandu que, pour première condition de son retour en Espagne, Marie-Christine avait exigé la retraite immédiate de M. Gonzalès-Bravo. Cela ne nous paraît point vraisemblable : Marie-Christine rentre à Madrid bien décidée, on l’assure, à venir de tous ses moyens en aide au gouvernement de sa fille ; elle ne commettra point une faute si grande que de s’aliéner le centre, cette puissante fraction du congrès dont M. Bravo est le principal orateur et le chef le plus résolu. Le président du conseil n’a rien fait encore qui pût justifier la dissolution du cabinet. Il peut en ce moment assurer ou détruire son avenir politique. C’est par l’énergie qu’il a conquis le pouvoir ; c’est par la modération qu’il méritera de le garder.


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