à l’île Maurice et au cap de Bonne-Espérance par une nation qu’ils ont droit de dire hostile, a indisposé les colons contre cette mesure, devant laquelle ils reculent toujours, au lieu de s’y préparer. Il leur semble presque, et l’erreur est fâcheuse, que la France s’unit avec un peuple poussé par un mauvais vouloir pour les dépouiller d’une propriété consacrée par les lois, ils ont eu peur même de l’enseignement religieux, distribué aux noirs avec discernement, sous le contrôle de l’autorité : oubliant ainsi que le maître, s’il doit, dans son intérêt propre, les secours du médecin à son esclave, est tenu en sa conscience de l’initier, d’autre part, aux espérances futures, qui lui feront supporter plus patiemment sa condition exceptionnelle. Les entraves que nos lois apportent au commerce des colonies ne sont pas, malheureusement, de nature à dissiper ces préventions à l’égard des dispositions de la métropole. Cependant la jeunesse aisée de Bourbon, qui vient en grande partie terminer ses études en France, puisera sur le continent européen des idées plus justes ; deux mille cinq cents enfans des deux sexes, qui reçoivent dans la colonie même les bienfaits d’une éducation première, devront aussi secouer ces préjugés. Le pouvoir à peu près absolu dont jouit le maître sur son habitation dès sa jeunesse explique ces fantaisies, ces caprices, qui le portent tantôt à une excessive indulgence, tantôt à une grande rigueur envers ses esclaves. Il est si difficile d’être toujours équitable quand on a l’habitude de commander sans contrôle. Avec cette préoccupation du maintien de l’autorité on verrait disparaître les dissonances fâcheuses qui choquent dans le caractère du colon, car il suffit d’avoir voyagé dans un pays de plantations pour savoir combien le créole est naturellement hospitalier, charitable et humain. On peut aussi juger du respect qu’inspire le blanc aux esclaves par la remarque suivante : sur un total de 412 crimes commis par ceux-ci, c’est-à-dire par une population moitié sauvage de près de 70,000 individus, pendant une période de cinq années, on ne compte que douze voies de fait envers des hommes libres.
Favorisée de la nature sur plus d’un point, puisqu’elle a des volcans sans tremblemens de terre, un climat salubre sous les tropiques, un sol fertile et propre à toute espèce de cultures, l’île Bourbon voit aborder par an 150 et 200 navires, dont environ 90 partis des ports de France. Deux à trois mille navigateurs la visitent chaque année ; chaque année aussi elle échange avec la métropole et les pays voisins une population flottante de plus de mille individus ; son mouvement