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POÈTES
MODERNES
DE LA FRANCE.

XLIX.
MARIE-JOSEPH CHÉNIER.

En 1764, l’année même de la naissance de Chénier, Voltaire, alors dans la plénitude de sa gloire et de sa dictature, annonçait, par un de ces éclairs soudains que la passion fait éclater au sein du génie, l’imminence d’un grand changement social. La révolution était prédite par lui en termes formels ; il écrivait au marquis de Chauvelin : « Ce sera un beau tapage. Les jeunes gens sont bien heureux ; ils verront de belles choses. » Je comprends ce regret personnel de Voltaire, et je le partage. C’eût été, en effet, un curieux spectacle que celui de la littérature du XVIIIe siècle venant, dans la personne même de son représentant le plus illustre, assister à la fois aux funérailles sanglantes de cette société vieillie qu’elle avait tuée, et au tumultueux avénement de cette société nouvelle qu’elle avait prédite avec pompe.