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peur. Enfin, c’est un barbier de Preston, l’homme de génie par excellence, Arkwright, qui réunit le premier ces inventions éparses, qui leur donne un corps et en forme dès l’année 1782 la manufacture de coton. En 1792, appliquant à une de ses filatures la belle découverte de Watt, il substitue au moteur hydraulique un agent nouveau, une force sans limites, la vapeur. Dès ce moment, et comme l’a dit son historien, M. Baines, il se fait dans l’industrie, une révolution immense, pareille à celle qu’avait opérée l’invention de l’imprimerie dans le domaine des sciences et des arts.

L’Angleterre, on le sait, a été appelée la dernière sur ce terrain. L’industrie, venant de l’Orient avec la civilisation, a marqué sa route par des étapes brillantes dont chacune a un nom dans l’histoire : Tyr d’abord, Venise ensuite, plus tard les Pays-Bas et la France de Colbert. La Grande-Bretagne a reçu ce dépôt grossi par les contributions de tous les siècles et de tous les peuples ; mais il s’est accru entre ses mains avec une rapidité qui tient du prodige, et jusqu’à balancer, par l’effort héroïque de deux ou trois générations, les progrès accomplis depuis deux mille ans. Eh bien ! ce que l’Angleterre a fait pour l’Europe civilisée, les Lancastriens l’ont fait pour l’Angleterre. À mesure que les arts industriels pénétraient dans cette île, c’est à Manchester qu’ils allaient se fixer. Manchester préparait et tissait la laine, avant de fabriquer les étoffes de coton ; sous une forme ou sous une autre, cette ville reste depuis le XVe siècle, la métropole manufacturière du royaume-uni.

Les premiers précepteurs de l’industrie anglaise furent les Flamands. Édouard III embaucha un grand nombre de ces artisans qui vivaient misérablement au milieu des splendeurs de Gand et de Bruges, « se levant de bonne heure, dit un historien[1], se couchant tard, travaillant rudement tout le long du jour, et ne se nourrissant que de harengs et de fromage moisi. » On leur promit qu’ils auraient du mouton et du bœuf à discrétion, que leurs lits seraient bons, leurs compagnes belles, que les yeomen se disputeraient l’honneur d’épouser leurs filles : et, de fait, ils s’enrichirent en apportant à l’Angleterre une richesse inconnue. « Les yeomen qui les reçurent dans leurs maisons, ajoute le même historien, s’élevèrent bientôt au-dessus des gentlemen, acquirent de grands domaines et blasonnèrent leurs possessions. » Aujourd’hui les manufacturiers font encore fortune dans la Grande-Bretagne, et quand ils ont acquis un manoir, ils obtiennent

  1. Fuller’s church History.