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parti, espérait qu’une fois la majorité conquise dans l’assemblée générale, la minorité se soumettrait. Il refusa donc la discussion, et ne fit aucun effort parlementaire pour prévenir la séparation. — Après le 18 mai, il avait un engagement à tenir, et il le tint en reproduisant l’ancienne transaction de lord Aberdeen. C’était malheureusement, comme on le fit justement observer, fermer la porte de l’écurie après que le cheval avait été volé. La transaction de lord Aberdeen fut d’ailleurs loin d’obtenir, soit dans le parlement, soit dans l’assemblée du clergé, un assentiment unanime. Elle fut vivement attaquée à la chambre des lords par lord Roseberry, qui déclara qu’elle violait les droits du peuple, et par lord Campbell, lord Brougham et lord Cottenham, qui pensèrent au contraire qu’en accordant aux communians le droit illimité d’objection et aux ecclésiastiques le jugement définitif, elle rétablissait la loi du veto sous un autre nom. À la chambre des communes, MM. Rutherford et Fox-Maule, au nom des non-intrusionistes, lord John Russell dans l’intérêt de l’union de l’église et de l’état, s’accordèrent, bien que fort divisés au fond, pour blâmer l’énorme pouvoir dont le bill investissait les cours ecclésiastiques ; et de cet accord il résulta que le bill, malgré les efforts de sir Robert Peel et de sir James Graham, ne passa qu’à une majorité de 18 voix ; 98 contre 80. — À l’assemblée générale, d’un autre côté, il entraîna quelques nouvelles séparations, tout en mécontentant le parti qui avait constamment lutté pour le droit des patrons. Il ne paraît pas d’ailleurs que partout la querelle doive se vider pacifiquement, et déjà, depuis le bill, plus d’un ministre légalement institué a trouvé ses nouveaux paroissiens en armes et décidés à s’opposer par la force à son installation. Si cette manière d’exercer le veto remplace l’autre, il est facile de prévoir ce que deviendra le droit des patrons.

Quoi qu’il en soit, les évènemens d’Écosse, bien que graves en eux-mêmes et défavorables au cabinet, n’ont rien, quant à présent, qui menace son existence. Il en est autrement des évènemens d’Irlande, qui depuis six mois fixent si vivement l’attention.

Quand en 1841 sir Robert Peel monta au pouvoir, tous ceux qui connaissent l’Irlande crurent et dirent que, comme sir Robert Peel l’avait annoncé lui-même en 1835, ce serait là sa grande difficulté. C’est en effet à sa haine pour l’Irlande que le parti dont sir Robert Peel est le chef avait dû sa récente popularité en Angleterre et ses succès électoraux. Il y avait dès-lors lieu de penser qu’à l’avénement de ce parti l’Irlande se sentirait blessée jusque dans ses entrailles,